À l'heure de refermer l'année 2024, le président de la Fédération française de golf revient sur les facteurs déterminants ayant contribué à d'excellents résultats sportifs.
L’année 2024 a été marquée par d'excellents résultats sportifs dans les rangs amateurs. Peuvent-ils être attribués à la stratégie fédérale ?
Je ne crois pas au hasard quand il s'agit de performances sportives à très haut niveau. Les excellents résultats ne tombent pas du ciel. Je crois plutôt à l’influence combinée de plusieurs facteurs. Sans aucun doute, nous avons fait de bons choix au sein de la Fédération, des choix structurants pour préparer nos plus grands espoirs. Dans le même temps, nos joueuses et nos joueurs professionnels nous prouvent aussi chaque semaine que tout est possible. Je trouve le golf français définitivement décomplexé. Les trajectoires de Céline Boutier et de Matthieu Pavon y sont pour beaucoup, sans oublier tous ceux qui ont brillé avant eux et ont inspiré des générations. En remportant l’Amundi Evian Championship, un tournoi majeur, Céline a, en 2023, brisé le plafond de verre. Matthieu, en s’imposant sur le PGA Tour dès sa première saison aux États-Unis, l’a définitivement cassé en 2024.
Les débuts réussis chez les pros de Martin Couvra et Tom Vaillant donnent également beaucoup de confiance aux meilleurs amateurs et sont à mettre au crédit de votre politique.
Oui. Même si ce n’est pas une fin en soi, parvenir dès sa première saison chez les professionnels à évoluer sur le DP World Tour et à conserver sa carte, comme Tom l’a fait, démontre que la formation de qualité qui leur a été délivrée porte ses fruits. Pour Martin, c’est la même chose. Le niveau du Challenge Tour est de plus en plus élevé, et seuls les meilleurs en sortent. Tous deux étaient prêts à affronter l’exigence du monde professionnel. Nous les avons bien préparés à cette transition. Les jeunes engagés dans un parcours de haut niveau et leurs parents ne sont pas aveugles : ils le constatent. La confiance se gagne par les résultats.
Et derrière Tom et Martin, d’autres frappent-ils déjà à la porte ?
Oui. Et je crois que pour une nation comme la France, si nous faisons bien notre travail, nous ne devrions pas connaître de « passages à vide » avec des générations moins performantes. En 2025, nous allons avoir le plaisir de suivre Adela Cernousek sur le LPGA Tour et Bastien Amat sur le DP World Tour. Tous deux viennent des rangs amateurs et ne sont pas là par hasard. Ils se sont hissés très haut dans les classements mondiaux avant d’atteindre l’élite professionnelle grâce au très relevé système des cartes d’accès. Il est bon de le rappeler : la plupart des joueurs qui sont dans le top 20 chez les professionnels ont déjà été top 20, voire top 10, chez les amateurs.
Aujourd’hui, peut-on dire que la France s’impose de plus en plus à l’échelle européenne et internationale comme un acteur majeur ?
Oui. C’est la deuxième année consécutive que nos quatre équipes (Messieurs, Dames, Boys et Girls) se qualifient pour les quarts de finale des grands championnats d’Europe. De plus, nous avons remporté le classement collectif des European Young Masters pour la deuxième fois d’affilée, ce qui témoigne de la qualité de la relève, notamment chez les U16. Nos U14 ont pris la deuxième place de l’Amundi Evian Junior Championship, et les girls ont terminé 4es de leur championnat du monde. Nous sommes sur le bon chemin. Je salue aussi par ailleurs, les paragolfeurs, les seniors Dames et Messieurs et les mid-amateurs Dames qui ont tous été champions d’Europe cette année. Nous sommes attachés à proposer une offre compétitive à tous les publics. Ces victoires viennent aussi récompenser notre capacité à animer la filière sportive dans toutes les catégories.
Mais comment la France peut-elle faire encore mieux ?
L’amélioration de nos performances est, comme je l’ai dit, le résultat de la combinaison de plusieurs facteurs. Je crois que nous effectuons un travail de qualité dans nos centres de performances. Mais ces structures ne concernent qu’une vingtaine de joueurs, alors que de nombreux talents émergent directement des clubs. Nous devons continuer à valoriser ce travail local et à renforcer la qualité de la formation dans l’ensemble des clubs pour élargir notre vivier et renforcer notre présence à haut niveau. Pour cela, il ne s’agit pas uniquement de moyens financiers. Nous devons également investir dans le développement des compétences à tous les niveaux, encourager l’ambition et croire en nos capacités. La montée en puissance de la qualité est déjà visible, mais nous devons encore accentuer cet effort pour maintenir et amplifier notre dynamique. En résumé, c’est un défi collectif qui nécessite l’implication de tous les acteurs du golf français, des ligues aux clubs, pour poursuivre cette progression et continuer à viser l’excellence.
Vous répétez que cette exigence dans la qualité de la formation est davantage indispensable pour une nation comme la France. Vous dîtes souvent que nous devons faire tout mieux que les grandes nations. Pourquoi ?
Avec 450 000 licenciés en France, nous sommes bien loin des chiffres de nations comme les États-Unis (25 millions de golfeurs), la Corée (1,5 million), ou la Nouvelle-Zélande, qui compte également 1,5 million de joueurs pour seulement 5 millions d’habitants. Ces chiffres illustrent l’ampleur du défi : rivaliser avec des pays où le golf est profondément enraciné dans la culture et où les bases de pratiquants sont immensément plus larges. Pour être compétitifs malgré ce désavantage quantitatif, nous devons exceller sur d’autres aspects : la qualité de la préparation, la performance de nos structures, et l’accompagnement sur mesure de nos jeunes talents. C’est cette stratégie qui nous pousse à innover et à développer des outils comme nos centres de performance, afin de compenser ce déficit structurel et permettre à nos athlètes de rivaliser avec les meilleures nations.
Comment sont financées les formations au sein des centres de performance ?
Une année de formation coûte environ 80 000 € par sportif, une somme inaccessible pour la plupart des familles. La ffgolf prend donc en charge l’essentiel de ce coût, demandant aux parents une participation modulée entre 2000 et 5000 €, selon leurs revenus. En contrepartie, les joueurs signent un contrat stipulant qu’une fois professionnels, ils rembourseront 80 000 € par année de formation, à condition d’atteindre un revenu annuel de 1,5 million d’euros.
Pourquoi instaurer un remboursement ?
Ce système permet de financer les futures générations d’athlètes. Ce retour est important, car il donne de la valeur à la formation reçue. Bien sûr, si un joueur ou une joueuse ne parvient pas à atteindre le plus haut niveau, nous assumons ce choix. Chez les hommes comme chez les femmes, les conditions sont identiques, bien que les gains soient souvent plus élevés chez les hommes. Nous tenons à ne pas pénaliser les joueuses et à leur offrir les mêmes opportunités. Avec des entraîneurs de haut niveau et des infrastructures uniques, nous pensons avoir créé un modèle sans égal dans le monde. Aucune autre fédération n’a développé des centres aussi performants pour les moins de 18 ans.
Quel accompagnement est prévu une fois la formation terminée ?
Nous assurons un suivi durant la période amateur et pendant trois ans après le passage au niveau professionnel. Ce soutien peut prendre la forme d’une aide financière (environ 20 000 € par an) ou d’un encadrement technique avec un entraîneur fédéral. Cependant, cet accompagnement est appelé à diminuer, car les meilleurs talents accèdent rapidement à un haut niveau, où ils deviennent moins dépendants de notre soutien. Cela nous permet de concentrer nos ressources sur les joueurs ayant le potentiel de rejoindre les 20 meilleurs mondiaux. La Fédération ne peut aider tout le monde, mais elle s’engage à accompagner les meilleurs des meilleurs.