Partie pour les États-Unis en août dernier, l’étudiante de la Texas Christian University s’est vue imposer deux ultimatums pour assurer sa bonne évolution. Et force est d’admettre que ça a fonctionné.

En huit mois, Camille Min-Gaultier est devenue l'une des deux meilleures joueuses de l'équipe de TCU. © Texas Christian University

Comme beaucoup d’autres avant elle, comme bon nombre de ses consœurs à venir, Camille Min-Gaultier a opéré en août dernier sa traversée de l’Atlantique. Désormais, elle est une Texas girl. Fraîchement débarquée dans les rues de la Texas Christian University (TCU) près de Dallas, la Varoise en portera les couleurs à dominante violet pendant trois ans encore. Jamais très loin d’une paire de santiags, son quotidien alterne entre cours d’économie, matchs universitaires de football américain et entraînements au Colonial Country Club. « On a des infrastructures incroyables, il y a pire pour s’entraîner », ironise-t-elle à propos du parcours hôte du Charles Schawb Challenge au calendrier du PGA Tour. Épanouie sur tous les plans, il lui a tout de même fallu trouver ses marques pour en arriver là.

L'équipe féminine de TCU lors d'un match universitaire de football américain. © Camille Min-Gaultier

Il y a d’abord eu la barrière de la langue. « J’étais loin d’être bilingue, donc j’étais perdue en cours. Et quand les coachs me faisaient des débriefings, je ne comprenais rien », avoue-t-elle dans un rire. Puis le jeu s’en est mêlé. Du moins, l’herbe sur laquelle elle le pratique. « C’est simple, je ne faisais que des grattes, donc j’ai vite appelé Franck (Lorenzo-Vera, son coach au Centre de performance de Terre Blanche, ndlr) pour régler ça. » Une fois l’adaptation des 90 premiers jours passée, la joueuse de 19 ans s’est imposée comme la meilleure de la formation des Horned Frogs aux côtés de Kristina Angosta. Seule une victoire la différencie de cette Américaine d’un an son aînée. Mais la Française peut se targuer d’une plus grande régularité, enregistrant par trois fois une 2e place et en signant un top 25 pour pire résultat. Cette semaine encore, c’est un top 10 qu’elle a ajouté à ses statistiques, faisant d’elle l’une des athlètes de première année les plus performantes de la première division universitaire. « Ses coachs m’ont dit qu’elle s’était parfaitement intégrée et que tout était positif pour elle aujourd’hui », résume la sélectionneuse de l’équipe de France Dames, Gwladys Nocera, qui était allée à sa rencontre en novembre 2024.

8

CETTE ANNÉE, CAMILLE MIN-GAULTIER A SIGNÉ HUIT TOURS (SUR VINGT-TROIS JOUÉS) SOUS LES 70. AUCUNE DE SES COÉQUIPIÈRES NE L’ÉGALE.

Le gain de la maturité

Pour expliquer cette première année universitaire en réussite, il faut remonter deux ans en arrière. Dans les rangs de la structure fédérale à cette époque, Camille Min-Gaultier était choyée, elle le reconnaît d’elle-même. Du côté de Terre Blanche, elle s’est laisse porter par son coach, appliquant les directives de manière scolaire. Cette rigueur, aussi efficace soit-elle, l’a amenée à être trop dépendante. Un défaut que Marine Monnet-Melocco, sélectionneuse de l’équipe de France Girls, a remarqué dans le même temps. « Franck et Marine m’ont dit qu’il fallait que je me bouge, que je n’étais pas assez autonome, et que ça allait se ressentir aux États-Unis. » Son année 2024 a ainsi été placée sous le signe de l’auto-gestion. Elle s’est mise à prendre des décisions, à organiser ses journées. « Ce n’est plus Franck qui venait vers moi mais je venais lui dire ce que je voulais travailler. Il m’a aussi appris à faire des retours sur mes sensations, sur mes frappes, mes trajectoires, etc. », énumère-t-elle.

Dans le même temps, la licenciée du golf de Valcros a tempéré son caractère colérique que laissaient apparaître à chaque fois les contre-performances. « Les coachs de la fac m’ont même dit que si je continuais à avoir cette attitude, elles ne me sélectionneraient pas pour jouer les tournois », illustre-t-elle. À date, les deux ultimatums ont payé. « J’ai grandi », rigole-t-elle. S’il lui reste une certaine douceur dans la voix, celle-ci se pare davantage de confiance et d’affirmation. « C’est la vie, c’est dans l’ordre des choses, rappelle Gwladys Nocera. En Europe, les filles sont encore chez elles, on s’occupe beaucoup d’elles et un jour elles se retrouvent à quitter leur domicile et elles évoluent. »

Une arme pour l'équipe de France

Si cette version américaine de Camille Min-Gaultier est profitable à la première concernée, elle peut également servir les intérêts de l’équipe de France Dames dans une année où s’organisent le championnat d’Europe par équipes et le championnat du monde par équipes à trois mois d’intervalle. Si elle venait à jouer l’un ou l’autre des événements, la Sudiste fêterait sa première sélection chez les « grandes. » Deux contextes qui, malgré un éventuel baptême, amènent à penser que la joueuse pourrait prendre plus de place au sein de la formation ; pourquoi pas devenir une voix du vestiaire. « Si ça se fait naturellement, tant mieux, mais je ne veux pas changer sa personnalité introvertie pour qu’elle soit plus extravertie, précise la coach nationale qui est aussi responsable de la filière féminine. L’essentiel est que toutes les filles qui seront sélectionnées soient bien intégrées en respectant les autres. »

Dans la foulée d’une fin de saison universitaire où se profilent les finales de conférence et du pays, les objectifs sont clairs : « Jouer les Europe et les Monde. » Il en est un autre, en revanche, qu’elle peut déjà effacer. Car avec un siège parmi le top 100 actuel du classement mondial amateur (elle est 94e), la Texas girl est là où elle voulait être en début de saison. Son regard se porte alors déjà un peu plus loin, jusqu’à l’année prochaine, où elle vise une participation à l’Augusta National Women’s Amateur. Pour cela, il faudra remonter encore dans le haut du panier international, au sein d’un top 50 pour lequel elle semble avoir déjà pas mal d’armes.