En représentant cette semaine la France au championnat d’Europe par équipes Messieurs, Gaspar Glaudas accomplit deux objectifs qui attendaient depuis de longues années dans la liste de ses envies. Ou le résultat d’un jeune homme qui se construit en grande partie tout seul.

Gaspar Glaudas est l'un des trois sélectionnés qui disputent leur tout premier championnat d'Europe par équipes, avec Darren Strachan et Édouard Cereto. © ffgolf

Il est des journées dont on se souvient du déroulé comme s’il n’était vieux que de la veille. Pour Gaspar Glaudas, les détails du vendredi 29 juin resteront longtemps dans son esprit et sa mémoire. À commencer par le déjeuner de ce jour-là. « J’étais chez moi, à table avec ma famille », commence-t-il a contextualiser. Rentré depuis quelques jours d’Irlande où il avait disputé l’Amateur Championship en compagnie - et en concurrence - de nombreux autres Tricolores, eux aussi en lice pour la sélection, le représentant d’Aix-Marseille était dans l’attente d’un coup de fil bien particulier. « À la fin du tournoi, Benoît (Teilleria, le sélectionneur de l’équipe de France Messieurs, ndlr) m’avait dit : "s’il y a un numéro de téléphone en 11 36 qui t’appelle, c’est bon signe." »

Chaque jour pendant une semaine, le joueur de 21 ans a trépigné à chaque coup de fil, souvent déçu de ne pas voir les deux nombres annonciateurs d’une sélection au championnat d’Europe par équipes Messieurs s’afficher. Et puis au terme de ce fameux déjeuner du 29 juin, à quelques gorgées d’apercevoir le marc dans sa tasse de café, sa poche s’est à nouveau mise à vibrer. « J’ai tout de suite pensé au numéro en 11 36 et là je l’ai vu, raconte-t-il dans un sourire. Je me suis levé et j’ai décroché. »

L'appel du coach

Benoît Teilleria : « Je lui ai demandé s’il se souvenait de ce que je lui avais dit sur mon numéro et quand il m’a dit oui, je lui ai annoncé qu’il était sélectionné en équipe de France. Ça a été bref, on a également parlé de son chipping et il m’a remercié. »

À la fin de la conversation, si les banalités ont repris comme à l’accoutumé pour le sélectionneur, celles du joueur sont devenues immédiatement plus égayées. « J’avais le sourire toute la journée, on pouvait me dire les pires trucs, je m’en fichais. Et évidemment, à l’entraînement l’après-midi, les coups sortaient super bien. » Il a donc suffi d’un échange téléphonique pour rendre palpable cet objectif de toujours qu’il partageait avec l’un de ses meilleurs potes des pôles Espoirs, Martin Couvra. Si leurs parcours de formation se sont détachés au cours de leur adolescence - l’un continuant en Centre de performance et l’autre n’ayant pas été retenu - leur amitié ne s’est jamais scindée. Malgré les sélections à répétition de son « frérot » aux boucles dorées, Gaspar n’était pas miné. « Je dirais que le fait de le voir aller en équipe de France me poussait à l’égaler et donc à m’améliorer. » Pourtant dans cette course-poursuite, les rôles n’ont pas toujours été les mêmes. « Il était meilleur que moi lors des premières années en pôles et c’est moi qui cherchais à le rattraper », raconte celui qui est désormais professionnel sur le Challenge Tour. « Ouais, il m’a bien rattrapé, plaisante Gaspar pour souligner l’avance prise par son compère. Mais comme je l’ai dit, ça m’a motivé davantage. »

Dans ce nouvel accomplissement, l’ancien amateur, lui aussi passé sous les ordres du même sélectionneur, a d’ailleurs eu son petit rôle à endosser. Indirect bien sûr, mais pas moins utile. « Benoît m’a appelé pour parler de Gaspar. Évidemment je l’ai bien saucé (sic) ! Mais plus sérieusement, je lui ai partagé ma vision sur de nombreux points et notamment sur ce qui, pour moi, est une de ses plus grandes forces : sa capacité à analyser ses parties et à digérer les mauvaises performances. Il m’a toujours impressionné sur ça. »

Une grande saison façonnée seul

Dans le portrait qu’il tire de son ami, il évoque des qualités de driving notables, un fort sens de l’humain et quelques ajustements nécessaires au chipping. Des atouts mais surtout des faiblesses que le principal intéressé a déjà décelé dans son jeu depuis un an maintenant. Car après son départ aux États-Unis en 2023, Gaspar Glaudas s’est retrouvé sans coach technique ; une norme outre-Atlantique où les coachs sont davantage des encadrants logistiques et conseillers sportifs, mais une surprise en France puisque les Tricolores expatriés ont généralement l’habitude de profiter des inter-saisons pour fignoler le swing avec leur entraîneur personnel. « Ça s’est fait naturellement, simplifie-t-il avec un flegme tout aussi spontané. Je serai amené à être souvent seul en tant que pro, donc autant commencer tout de suite. Au moins, je me connais bien, je sais dans quoi je tombe quand ça se passe mal en tournoi et je sais comment rectifier ça. » À une époque où la grande majorité des amateurs de haut niveau s’encadrent d’experts techniques, physiques et mentaux, l’athlète de l’Indian Hills Community College (deuxième division universitaire américaine) s’est forgé jusqu’à la fin d’année 2023 à coups d’auto-coaching et de vidéos YouTube. « Je regarde pas mal de contenus des différents équipementiers dans lesquels on voit Scottie Scheffler, Rory McIlroy, Jordan Spieth, Rickie Fowler ou encore Tiger Woods donner leurs petits conseils. J’écoute, je regarde comment ils font et je conserve ce qui peut m’être utile. »

De la sorte, l’étudiant de deuxième année universitaire a décroché ses deux premières victoires individuelles et une autre collective, auxquelles se sont greffés quatre top 5, lors des neuf derniers mois. Sa meilleure saison jusqu’à présent. « Certains diront que ce n’est que de la deuxième division mais, quel que soit le niveau où l’on joue, il faut chercher à être le meilleur », nuance Martin Couvra.

Un nouveau coach !

Depuis novembre 2023, Jean-François Lucquin accompagne Gaspar Glaudas sur le plan technique. Les deux hommes ont principalement travaillé au travers de la vidéo jusqu’à présent mais comptent bien faire évoluer leur collaboration nouvelle.

À l’assaut de l'Europe

Alors voilà celui qui se fait surnommer « Gasp » être officiellement joueur de l’équipe de France, qui plus est à l’occasion d’un championnat d’Europe par équipes. Du côté de Turin cette semaine, il aura à ses côtés un autre bon copain, celui avec qui il partageait les bancs d’Indian Hills jusqu’en mai : Édouard Cereto. Ensemble, ils honoreront leur toute première cape et complèteront le groupe de six composé par Bastien Amat, Paul Beauvy, Ugo Malcor et Darren Strachan. Tous évolueront sous les ordres du sélectionneur, du capitaine Guy Forget et du kinésithérapeute et préparateur physique Khélil Baba-Aissa pour une semaine toujours particulière, car disputée dans un format collectif souvent rare dans le calendrier des joueurs. « Je n’ai pas posé de questions à Martin sur la semaine car je veux découvrir les choses par moi-même. On a discuté de Benoît, du staff en général et de l’ambiance du groupe. En tout cas, je suis impatient, excité aussi à l’idée de rencontrer Guy et de voir ce qu’il a à nous apporter. Ça va être génial ! » Les Français s’élanceront mardi avec deux tours de stroke play en deux jours suivis, en cas de qualification parmi les huit meilleures équipes, d’une phase en match play à élimination directe.