Après quatre très bons premiers tournois en 2024, Antoine Rozner a choisi de couper deux semaines avant de reprendre en Afrique du Sud, jeudi prochain. Une pause qui nous donne l'occasion de plonger dans les statistiques et sa nouvelle manière de s’entraîner depuis un an.

Antoine Rozner, au départ d'une matinée visiblement fraîche au Qatar. © Octavio Passos / Getty Images - AFP

Par ordre chronologique en 2024 : 32e, 16e, 12e, 6e. S’il respecte son schéma de performance crescendo comme il l’a fait lors des quatre derniers tournois, Antoine Rozner devrait signer son premier top 5 dès sa reprise, la semaine prochaine au SDC Championship, et soulever le quatrième trophée de sa carrière sur le DP World Tour au Porsche Singapore Classic à la fin du mois de mars. Loin de tout mauvais œil, on le lui souhaite. Mais de manière plus scientifique, tous les indicateurs laissent penser que la chose est probable. Car le début d’année 2024 du Racingman est non seulement appréciable, mais très appréciée de l’intéressé : « C’est un démarrage sérieux, appliqué et régulier, qui lance bien la saison sur le plan comptable », englobe-t-il avant de transposer son regard sur le passé vers les semaines à venir : « Il y a de la place pour remplir pas mal d’objectifs, à commencer par une qualification pour l’USPGA, puis les Jeux olympiques, et aussi la montée sur le PGA Tour. »

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ROZNER EST ACTUELLEMENT 24E DE LA RACE TO DUBAI, LE 3E BLEU DERRIÈRE UGO COUSSAUD (13E) ET FRÉDÉRIC LACROIX (16E).

Pourtant, celui qui avait porté la tunique tricolore à Tokyo en 2021 ne se leurre pas sur la difficulté de renouer avec cet honneur en juillet prochain à Paris. Non pas en raison d’un niveau de jeu insuffisant, mais pour un déficit de points mondiaux vis-à-vis de ses compatriotes évoluant sur le circuit américain. « Ça va être dur de rivaliser, mais si je fais ce que j’ai à faire en termes de résultats, il y a peut-être une chance. En tout cas, j’ai organisé mon calendrier pour que mon pic de forme arrive pour les mois de juin et juillet, puisque c’est une grosse période avec le Scottish Open et The Open. » Pour arriver à ses fins, le golfeur de 31 ans va aussi pouvoir s’appuyer sur sa nouvelle botte secrète.

Molinari, « lo scienziato »

Tout est parti d’un fitting avec l’équipementier du licencié du RCF La Boulie au début de l’année 2023. Au détour de quelques réglages de ses outils, les techniciens lui vantent alors la qualité de travail d’Edoardo Molinari. Pas celle du joueur, celle du statisticien. Car depuis 2011, l’Italien surnommé « Dodo » s’est plongé dans un suivi très poussé de ses performances, tous compartiments confondus, pour améliorer ses résultats. Une pratique qui a ensuite fait parler d’elle, pour aujourd’hui le voir accompagner une bonne trentaine de joueurs du DP World Tour et du PGA Tour tels que Victor Hovland et Matthew Fitzpatrick. Et depuis douze mois maintenant : Antoine Rozner. « En un an, j’ai vu l’énorme bénéfice que ça peut m’apporter, à commencer par dégager deux ou trois secteurs de jeu qui sont améliorables », loue l'intéressé. À raison de 10 à 12 minutes après chaque partie, le Francilien respecte son rituel de remplir sur une feuille Excel l’ensemble des données demandées par le vice-capitaine de Ryder Cup, lesquelles sont partagées aux différents membres de son staff. « Ensuite, il nous envoie un rapport d’une trentaine de pages avec beaucoup de très bonnes informations, qui nous permettent de fixer un axe d’amélioration », raconte le joueur.

Entouré par Patxi Londaitz au sac, Jon Karlsen au putting, Graham Walker au petit jeu, Laurent Hubert au physique et de Benoît Ducoulombier à la technique, le triple vainqueur sur le circuit européen a également fait appel à Mathieu Santerre au printemps dernier pour l’accompagner à l’entraînement. Le coach émérite de l’équipe de France Messieurs - technicien de Romain Langasque et Martin Couvra dans le même temps - l’aide d’abord à décrypter les rapports envoyés par le Transalpin pour ensuite les convertir en exercices ciblés hors tournois. « La recherche d’optimisation à l’entraînement est une demande de plus en plus courante de la part des joueurs pour ne pas passer trop de temps à se fatiguer. L’objectif, pour nous, est donc d’arriver à tirer quelque chose d’assez simple à partir des données et de travailler intelligemment », explique le coach.

Une histoire de dixièmes

La dernière illustration en date remonte à cette semaine. De retour à l’entraînement du côté de Cannes après les quatre premiers tournois de l’année, l’accent a été mis sur les coups de wedge à moins de 100 mètres et sur les longs coups de fers. « Il est ressorti que sur les drapeaux positionnés sur la partie gauche des greens, je manquais souvent la cible en restant "short side" (le côté laissant le moins de place pour travailler la balle sur le green, ndlr), explique l’intéressé. Donc, on a établi diverses solutions pour essayer de rectifier ça : prendre plus de marge sur ces drapeaux-là et m’exercer à un coup qui me permette de moins manquer à gauche. » « Tout ça se fait dans l’objectif de gagner des dixièmes de coup, parce que c’est de ça qu’il s’agit dans le haut niveau, ajoute Mathieu Santerre. Entre le 1er joueur mondial et le 10e, il y a 0,5 coup de différence par partie. Tout comme entre le 10e et le 50e mondial. »

Mais en parallèle des axes de progression, les rapports de Molinari lui ont également permis de voir les compartiments améliorés. « Et le gros point positif du début de saison, c’est le putting », avance le joueur. Face à une moyenne de 29,52 putts par tour en 2023, Rozner en est cette saison à 28,75, soit sa meilleure moyenne des quatre dernières années et un demi-coup de mieux que la moyenne du circuit jusqu’à présent ; de quoi le mettre en position de prétendant lors des prochaines semaines. Il ne manquera plus alors que le retour de son point fort à son niveau optimal, le driving, pour avoir le barillet au complet. Et ça tombe bien : il a repris « pas mal confiance là-dessus » ces derniers temps...