Entre les promotions de Julien Brun et Frédéric Lacroix sur le Tour européen et les exploits de Pauline Roussin-Bouchard aux cartes américaines, les joueurs de la St Laurent Golf Team ont fait les gros titres de l'actualité du golf français ces dernières semaines. Présentation d'un concept innovant et efficace avec son créateur, l'ancien pro Maxime Demory.
Ils ont pour nom Julien Brun, Frédéric Lacroix, Matthieu Pavon et Benjamin Hébert. Leurs points communs ? Ils évolueront tous sur le Tour européen lors de la saison 2022, et portent tous la casquette ornée du logo de la St Laurent Golf Team. À ce quatuor masculin il faut aussi rajouter la touche féminine apportée depuis cet été par Pauline Roussin-Bouchard, actuelle leader de la finale des cartes d'accès au LPGA Tour (Q-Series) après avoir remporté le Stage II mi-octobre. Entre les premiers cités, récents promus parmi l'élite à l'issue d'une saison sur le Challenge Tour conclue aux 4e et 5e places respectives, les deux autres établis sur l'European Tour depuis plusieurs années, et la dernière considérée comme une future star du golf féminin mondial, ce quintette de choc n'est pas loin de représenter ce qui se fait de mieux dans le golf français à l'heure actuelle. Ces cinq-là forment donc la St Laurent Golf Team, un collectif original dans ce sport si individuel qu'est le golf, imaginé par Maxime Demory fin 2014.
« L'idée m'est venue d'un constat que j'avais fait quand j'étais joueur, à savoir que j'avais décelé un certain nombre de manques qui m'avaient empêché de progresser. J'avais trouvé des failles dans le système, et j'ai essayé d'y remédier avec mes moyens pour venir en aide aux jeunes générations », explique cet ancien pro sur l'Alps Tour et le Challenge Tour à la fin des années 90 et au début des années 2000. « En ce temps-là, quand on était amateur de haut niveau, on avait un staff fédéral qui gérait à peu près tout, et quand on passait pro on se retrouvait tout seul à la tête d'une société, chose à laquelle personne n'avait été formé. Les joueurs savaient très bien jouer au golf, mais le monde professionnel requiert malgré tout bien d'autres compétences que le fait de savoir taper dans une balle. Quand on a 20 ans et qu'on débarque dans le monde pro, si on n'est pas câblé comme il faut, on peut très vite se perdre... Je me suis dit qu'il y avait quelque chose à faire pour partager un peu plus les expériences, fédérer les coûts et offrir ainsi plus de services aux joueurs. J'ai donc créé ce team en pensant que l'union fait la force. »
Cooptation et réciprocité
Son concept en tête, Maxime Demory a mis à profit son réseau, constitué au cours de sa carrière sur les circuits et lors des nombreux pro-ams qu'il a disputés, pour le présenter à dirigeants d'entreprise susceptibles de l'accompagner dans cette aventure. « Ça s'appelle St Laurent car les premiers qui m'ont fait confiance sont Jérôme Servat et Guillaume Vaillant, les patrons d'une société gardoise spécialisée dans le PVC et l'aluminium, qui s'appelle Menuiseries St Laurent. Marc Maisonneuve, un troisième "mécène" à qui j'ai aussi donné des cours de golf, et qui a une société de gestion de patrimoine en Suisse, nous a rejoints par la suite », raconte-t-il. Côté joueurs, Jean-François Lucquin, Julien Foret, Raphaël Eyraud et Edouard España forment l'ossature de la première version de la team, lancée courant 2015. Au fil des années, d'autres arrivent, en addition ou en remplacement des premiers, tels que Victor Perez et Thomas Linard. À chaque fois, au terme d'un processus de cooptation véritablement collectif : « À chaque fin d'année, on fait une réunion avec tous les joueurs pour étudier différents profils. Chacun donne des noms, et on prend une décision tous ensemble pour savoir qui nous rejoindra l'année suivante. C'est comme ça qu'on a pris Brun, Lacroix, Perez... Je ne veux pas me rabaisser, mais quand on me dit que j'ai du nez, ce n'est pas que moi qu'il faut créditer, c'est toute l'équipe ! » sourit Maxime Demory.
S'il peut intervenir, à la demande des uns et des autres, en tant qu'agent au sens strict du terme – celui qui est chargé des inscriptions aux tournois, de l'organisation des déplacements, du démarchage des sponsors, etc. – le patron insiste sur le fait que les atouts de la St Laurent Golf Team dépassent largement ces simples contingences logistiques. « Pour les joueurs, il y a trois plus-values », énumère-t-il. « La première est financière : on met à leur disposition une enveloppe qui leur permet de commencer la saison sans souci. La deuxième, c'est qu'on leur organise trois fois par an des rassemblements d'une semaine dans des endroits tels que PGA Catalunya, Terre Blanche, Dubaï ou le Maroc, pour leur offrir une session d'entraînement dans les meilleures conditions. À leur demande, je peux intégrer au groupe un kiné, un coach, un préparateur mental, etc. À mon avis, ce type de rassemblement leur apporte quelque chose de précieux, car ils peuvent non seulement bosser dans de très bonnes conditions, mais aussi jouer avec des partenaires qui vont les tirer vers le haut. Enfin, sans aucune présomption, je dirais que la troisième plus-value est le fait d'être à leur écoute. Ils savent que je suis là pour leur trouver une solution à un problème particulier (changer de caddie, trouver de l'aide pour leur compta, etc.), ou tout simplement pour parler. » L'élément le plus original dans le concept de la St Laurent Golf Team est sans aucun doute le principe de réciprocité financière instauré entre les joueurs : si l'un d'entre eux dépasse les 500 000 euros de gains sur l'ensemble d'une saison, il s'engage à reverser au pot commun un certain pourcentage, qui n'excède pas le montant de l'enveloppe allouée en début d'année. « Ça sert à intégrer quelqu'un d'autre dans la team », explique Maxime Demory.
L'importance du collectif
En plaçant ses quatre joueurs sur le DP World Tour, et (très probablement) sa représentante féminine sur le circuit américain, la St Laurent Golf Team a complètement validé l'efficacité de son concept. Au point de causer quelques sueurs froides à Maxime Demory – « ça va commencer à devenir serré en termes de budget ! » plaisante-t-il – mais surtout de lui inspirer des ambitions supplémentaires. « Pour l'instant, je suis seul et j'ai du mal à être partout, mais c'est sûr qu'avec plus de moyens j'aimerais en faire davantage. Jusqu'à présent, on s'est contentés, en gros, de prendre des joueurs du Challenge Tour et de les faire monter, mais je suis persuadé qu'il y a autant de travail, voire plus, pour aider des gars de l'Alps Tour ou du Pro Golf Tour à réaliser leur potentiel. Que ça soit par un coup de pouce financier ou en termes d'organisation », conclut-il.