De retour à la compétition depuis le 20 février au Kenya après dix mois d’absence en raison d’une blessure au poignet gauche, Julien Brun bénéficie d’une exemption médicale pour encore douze tournois sur le DP World Tour. 

On reverra surtout Julien Brun sur le DP World Tour à partir du mois de mai, en Europe. © Luke Walker / Getty Images - AFP

C’est confortablement installé dans sa chambre d’hôtel à Singapour devant la télévision, impatient de suivre le play-off opposant Rory McIlroy à J.J. Spaun ce lundi 17 mars au Players Championship, que Julien Brun a décroché son téléphone et conversé avec nous durant une bonne vingtaine de minutes. Arrivé dans la cité-État le jour même après avoir volé de nuit depuis Dubaï, où il réside depuis début janvier, il s’apprête à disputer le troisième tournoi de sa saison sur le Tour européen : le Porsche Singapore Classic

Blessé au poignet gauche depuis le début du mois de mai 2024, le Français bénéficie pour le moment d’une exemption médicale. Il a très exactement quatorze tournois pour tenter de sauver son droit de jeu pour la saison prochaine. Il ne lui en reste plus que douze après avoir pris le départ du Magical Kenya Open puis du Joburg Open.  

Cette reprise au plus haut niveau s’est plutôt bien passée si l’on se réfère uniquement à l’état de son poignet gauche, opéré en septembre dernier. « Le poignet va bien, souffle doucement Julien Brun. C’est la bonne nouvelle de ces dernières semaines. Cela ne me gêne pas, je peux jouer sans problème, je peux m’entraîner normalement, avec des charges conséquentes, donc c’est vraiment bien. C’est un vrai point positif. »

« J’ai encore quelques exercices physiques à suivre concernant le poignet, poursuit-il. Je continue un petit peu. Il y a un suivi régulier avec mon kiné (Ndlr, l’Écossais Ian Dingwall) qui est souvent là sur les tournois. On travaille dessus, on vérifie certaines choses par-ci, par-là. C’est quelque chose que je vais devoir suivre toute ma carrière. Mais je n’ai plus la moindre appréhension sur mes coups. Et ça, c’est bien. »

Soixante-quatrième le 23 février au Kenya, il n’a pas réussi à franchir le cut deux semaines plus tard au Joburg Open, n’ayant pas pu entretemps entrer dans le champ au Investec South African Open Championship

« En termes de résultat, la reprise est un peu mitigée, précise l’ancien étudiant de Texas Christian University. Le point positif, c’est que je peux jouer normalement. Je peux enchaîner les tours. Après, forcément, au niveau du jeu, il y a encore du travail à accomplir. J’ai eu quatre mois d’arrêt complet sur les dix derniers mois, sans compter toute la rééducation derrière. Compte tenu de tout ça, au final c’est quand même pas mal. »

« Au Kenya, ça a été un peu difficile, ajoute-t-il encore. J’ai eu du mal à être régulier. Il y a eu de bonnes choses mais il y a eu aussi de très mauvaises choses. Notamment sur le long jeu. C’était dur d’enchaîner et d’avoir de la régularité. J’ai quand même réussi à franchir le cut en jouant notamment -4 sur les dix derniers trous pour me donner une chance. Cela a été bien meilleur au Joburg Open. J’ai réussi à enchaîner certaines séquences comme par exemple sept à neuf trous de suite de qualité. Et ça, c’est encourageant. Même si, dans l’ensemble, je n’ai pas été performant sur les greens. Mais c’est un début de reprise, avec des choses à travailler. Le plan a l’air bon. Il faut juste jouer des tours, avec de la répétition. Et aussi un peu de temps pour digérer tout ça. »

Cinq semaines de break après Singapour

Présent on l’a dit cette semaine à Singapour, sur un parcours qu’il apprécie et où il se sent plutôt à l’aise (Ndlr, 12e en 2023, 37e en 2024), Julien Brun effectuera ensuite un long break d’un mois. Il a ainsi choisi de ne pas faire le voyage jusqu’en Inde (27-30 mars) ni de s’engager sur les deux tournois programmés en Chine entre le 17 et le 27 avril. 

« La Chine, ça ne m’a pas fait vibrer l’an dernier, lâche-t-il dans un sourire. Je vais avoir un gros mois devant moi après Singapour. Pour bien bosser les choses qu’on a mis en place. Je jouerai donc le Championnat de France professionnel MCA au Cabot Bordeaux (1er-3 mai) avant d’enchaîoner avec les étapes européennes, où je vais quasiment tout jouer. J’irai en Turquie, en Belgique, en Autriche, je ferai le KLM Open, l’Italie mais peut-être pas le BMW International Open à Munich. Je jouerai aussi les deux tournois aux États-Unis au mois de juillet (ISCO Championship et Barracuda Championship). »

Je ne vais pas aller en Inde. Le parcours, là-bas, est très étroit. On peut perdre sa balle à tous les trous. Si on n’est pas serein, surtout quand on a des cartouches « limitées » comme moi cette année, on n’y va pas.

Il entend également disputer des « gros tournois » du Back9 à partir du 21 août comme le British Masters, l’Omega European Masters et l’Irish Open. Le but de la manœuvre est évidemment ici d’engranger les 300 points qui lui permettraient de conserver sa carte pour 2026. « Je vise au moins les 426 points de Ross Fisher l’an passé, qui avait fini 114e de la Race », confirme-t-il. 

« Avec Singapour, il me reste douze tournois à jouer, annonce-t-il. Une fois qu’on est sur le parcours, on ne pense plus à ce compte à rebours. Il faut faire du mieux possible, c’est évident. Plus que sur le mental, ça joue sur la planification de mon calendrier. "Est-ce que je vais jouer ce tournoi ? Est-ce que je dois enchaîner ou pas ? Comment je me sens dans mon jeu ?" C’est différent quand on compare ça à une catégorie pleine. Dans ce cas de figure, on s’inscrit partout et on progresse de tournoi en tournoi. On peut se le permettre alors que là, comme je n’ai pas été très performant du tee au Kenya et à Joburg, je ne vais pas aller en Inde. Le parcours, là-bas, est très étroit. On peut perdre sa balle à tous les trous. Si on n’est pas serein, surtout quand on a des cartouches "limitées" comme moi cette année, on n’y va pas. »

Conscient que l’année 2025 pourrait être décisive dans sa carrière de golfeur professionnel, Julien Brun a décidé de quitter Prague et la République tchèque pour venir s’installer à Dubaï. A l’instar de nombreux autres joueurs français tels Gary Stal, Joël Stalter, Julien Guerrier ou encore Alexander Levy. Il ne regrette pas ce choix. 

« Prague ? C’est très bien mais pas en hiver, résume-t-il. Là, c’est très agréable de pouvoir tous les jours travailler en short et en polo. On s’est fait quelques parties sympas avec les autres Français… Et puis la qualité des parcours, et des infrastructures, est sans commune mesure avec ce que je pouvais avoir du côté de Prague. Ici, je peux chiper, je peux putter sur des greens de qualité. Ma compagne est plutôt contente d’être là. Elle s’y plaît. C’est un bon changement. »

Seul petit bémol, l’éloignement avec son staff technique resté en France. Mais comme l’énonce encore Julien Brun, « si cela ne facilite pas les choses d’un point de vue logistique », cela n’empêche pas Olivier Léglise, son coach technique et grand jeu, ni Robin Cocq, son coach de performance et de petit jeu, de venir lui rendre visite. 

« Robin est venu la semaine dernière pour quatre jours, souligne-t-il. Je l’avais également vu en janvier. On a des super conditions de travail. J’ai beaucoup joué au Els Club mais je m’entraîne aussi beaucoup au Montgomerie Golf Club grâce à Callaway, qui me facilite pas mal les choses, ainsi qu’au Jumeirah… En étant membre du DP World Tour, on a aussi accès à la zone d’entraînement de l’académie de Tommy Fleetwood… Qui est parfaite. »

Si on doit redescendre sur l’HotelPlanner Tour, on redescendra. J’ai déjà réussi à monter par ce biais-là. Je pourrais le refaire, comme ont pu le faire Alex Levy ou Benjamin Hébert en 2024.

Actuellement 204e de la Race to Dubaï, loin, très loin de la frontière pour l’instant fixée à la 111e place, Julien Brun se prépare néanmoins à toutes les éventualités. Les bonnes comme les mauvaises. Cette perspective ne l’émeut pas. Au contraire. Cela peut même constituer un moteur supplémentaire. 

« Perdre la carte, c’est en effet une possibilité, conclut-il. J’ai 300 points à accumuler, ce qui est conséquent, mais je peux les faire en un seul tournoi. C’est aussi ça la réalité. Je peux très bien rater les dix prochains cuts et faire une 2e place qui suffirait pour au moins avoir les droits de jeu sur cette saison. Et puis si on doit redescendre sur l’HotelPlanner Tour, on redescendra. J’ai déjà réussi à monter par ce biais-là. Je pourrais le refaire, comme ont pu le faire Alex Levy ou Benjamin Hébert en 2024. Ce n’est pas quelque chose qui me fait peur. La priorité, c’est plus de proposer un bon niveau de jeu, d’être capable d’enchaîner les tours à -2, -3 ou -4. Et puis si j’arrive à faire ça, tout s’enchaînera. Dans le cas contraire, on fera de même sur l'HotelPlanner Tour. Ou aux Cartes, si je dois y aller. »