Tête d'affiche du FedEx Open de France, le joueur du PGA Tour admet que sa première saison américaine a été éprouvante, et compte bien tout faire pour être encore plus performant l'an prochain de l'autre côté de l'Atlantique afin de participer à la Ryder Cup. 

Le Bordelais est ce jeudi au départ de son open national. © Warren Little / Getty Images - AFP

Comment vous sentez-vous depuis votre retour en Europe ?
Je me sens bien, mais plutôt fatigué. J'ai l'impression que je n'ai pas eu vraiment le temps de pouvoir souffler après cette saison assez éprouvante du côté américain. J'attends impatiemment la fin du tournoi dimanche pour pouvoir retourner chez moi aux États-Unis pendant trois semaines et vraiment prendre du temps pour moi.

Vous n'êtes donc pas sûr d'aller jouer le premier tournoi des Play-Offs du DP World Tour à Abou Dhabi, du 7 au 10 novembre ?
Pas sûr, parce que comme je disais la saison a été vraiment longue, et au bout d'un moment je dois penser plutôt à mon bien-être qu'à enchaîner.

Néanmoins, vous n'êtes pas assuré d'être à la finale de la Race tu Dubai la semaine suivante...
Oui, il faut que je sois dans le top 50, et pour l'instant je suis tout juste dedans, mais encore une fois ça va dépendre. Je ne vais pas jouer la semaine prochaine en Andalousie, je n'irai pas jouer en Corée la suivante, et je ne sais pas encore vraiment si j'ai envie d'aller à Abou Dhabi pour peut-être ne faire qu'un tournoi sachant que c'est quand même diamétralement opposé de là où je vis, donc on verra. Je vais d'abord me reposer pendant trois semaines, m'entraîner, faire ce que j'ai à faire, et puis si je me sens bien, si je me sens compétitif, j'irai. Mais pour l'instant, on est plutôt en mode survie qu'en mode compétition.

Avez-vous senti venir cette période de fatigue ?
Oui. À la fin de la FedEx Cup (le 1er septembre, ndlr), d’un coup toute la pression est retombée. Toute l’année, j'ai enchaîné, et émotionnellement c'était différent de ce que je connaissais. Il fallait apprendre, et vite. Il y a eu pas mal de choses à gérer. Et quand ça a été fini, il y a eu un gros coup de barre. Et c’est à ce moment-là qu’il aurait été important pour moi de prendre du temps avec ma famille, prendre du recul sur ma saison, mais je suis rentré chez moi en Floride à peine une semaine... Au final, on n’arrête vraiment jamais : c'était déjà l’heure d’aller à Wentworth pour le BMW PGA Championship, puis à Madrid pour l’Open d’Espagne, et en Écosse pour le Dunhill Links Championship la semaine dernière, qui n’était pas prévu mais pour lequel j’ai eu le super cadeau de pouvoir amener mon amateur. Et maintenant, c’est l’Open de France… En fait, on ne s’arrête jamais. C'est difficile à gérer.

En termes de quantité de tournois, c'est votre saison la plus chargée ?
Pas tant que ça. Je pense que le nombre va être peut-être similaire aux autres années, autour de 28 tournois, mais c'est surtout mentalement que c'était usant. Toujours essayer de se préparer pour donner son meilleur, toujours se remettre dans des états de concentration, c'est assez fatigant. Et la grosse différence, c'est que les autres années, je jouais un Majeur par an au mieux ; cette année j'en ai joué quatre, plus au moins autant d'autres tournois que je qualifierais de Majeurs, comme le Players, le Memorial, Bay Hill, le Tour Championship, etc. Donc en fait, je me retrouve à la fin de l'année à avoir joué environ dix Majeurs, c'est-à-dire des tournois qui en termes de concentration, de difficulté, d'intensité, sont vraiment un cran au-dessus.

Comment allez-vous gérer cela l'an prochain ?
Ce qui est sûr, c'est que je ne sortirai pas des États-Unis, parce que c'est une année de Ryder Cup et que c'est un rêve de gamin de la jouer. Donc je veux vraiment me donner toutes les chances de pouvoir atteindre cet objectif, et pour moi le la meilleure façon d'y arriver, c'est de bien jouer aux États-Unis. Et pour économiser un maximum d'énergie, avoir une chance de bien performer là-bas, il va falloir limiter les déplacements et établir un calendrier qui me permette d'avoir des semaines de repos et d'entraînement pour pouvoir bien jouer lors des grands événements. Quand on arrive sur un circuit, quand on est rookie, on ne dit jamais non, entre guillemets, on essaye de jouer le plus possible ; mais pour l'année prochaine j'ai une vision plus globale de ce que je vais pouvoir jouer, donc ça va être plus facile pour moi de faire un calendrier qui me permette de rester en forme toute l'année. Donc je vais limiter les retours en Europe au seul British Open, a priori.

En parlant de rookie, vous êtes en lice pour le titre de Rookie of the Year sur le PGA Tour. Que vous inspirerait le fait de recevoir un tel trophée ?
C'est un super trophée qui a beaucoup de valeur à mes yeux. Il n'y a qu'un rookie de l'année sur ce qui est pour moi le plus grand circuit du monde, donc l'avoir serait génial. Ce n'était pas du tout un objectif à la base, mais quand j'ai fini septième à Hawaï, j'ai envoyé un message sur le groupe qu'on a avec tout mon staff et j'ai dit "voilà mon objectif cette année". Après, voilà, il y en a un autre qui pour moi a fait une saison encore plus belle que la mienne : Nick Dunlap, qui a gagné en tant qu'amateur puis en tant que professionnel sur le Tour. C'est exceptionnel, c'est historique ! Donc, même s'il a manqué plus de cuts en Majeurs, même s'il a fini derrière moi à la FedEx Cup, ce serait normal à mon sens qu'on donne ce trophée à un joueur de 21 ans qui a réalisé une saison aussi exceptionnelle.

Vous êtes aujourd'hui considéré comme la locomotive du golf français. Qu'en pensez-vous, et quel regard portez-vous sur vos compatriotes ?
Le regard que j'ai est plutôt tourné vers les jeunes joueurs. C'est envers eux que j'ai l'impression d'avoir une sorte de devoir, d'être effectivement une locomotive ; pas tant envers les joueurs de ma génération et de celles d'avant, que j'ai côtoyé ces dernières années et qui sont mes amis. Les gens ne se rendent pas compte à quel point on a de très, très bons joueurs de golf chez nous, et je pense très sincèrement qu'il y a un paquet de joueurs français qui, s'ils avaient joué sur le PGA Tour cette année, n'auraient eu aucun mal à garder la carte. Bien sûr, gagner un tournoi ou faire la FedEx Cup jusqu'au bout, ce sont des choses qui sont un peu différentes, mais j'ai au moins trois ou quatre noms en tête pour qui le simple fait de jouer là-bas, de faire de bons résultats et de garder la carte pendant plusieurs années serait largement à leur portée. Et il y a une dynamique cette année avec de nouveaux vainqueurs, David (Ravetto) et Frédéric (Lacroix), des gars comme Romain (Langasque) et Antoine (Rozner) qui sont toujours parmi les meilleurs joueurs européens, et un joueur comme Ugo (Coussaud) qui pour sa première année sur le Tour a failli gagner et va jouer la finale de la Race. Alors, est-ce que je suis leur locomotive, c'est à eux de le dire, mais je n'ai pas l'impression que c'est grâce à moi qu'ils se sont révélés !