C’est un retour réussi mais passé sous une totale discrétion. Après une période d’éloignement et quatre premiers mois de jeu sur le LPGA Tour, Perrine Delacour revient sur sa reprise, entre indifférence et recentrage de ses objectifs de vie.
On aurait pu s’attendre à la voir cette semaine au Meijer LPGA Classic, mais finalement Perrine Delacour a opté pour un retour d’une semaine dans son cocon floridien où elle a établi domicile depuis une dizaine d’années. Ce mardi, c’est en terminant son encas matinal qu’elle décroche le téléphone. La voix est posée, presque occupée, elle amorce : « Ça fait plaisir d’être chez soi, j’en avais marre d’être dans les valises à droite, à gauche. Je profite de mon lit, de la maison, ça fait du bien. » Désormais, Perrine s’écoute. Après une année 2022 où elle a connu une période de surentraînement qui l’a contrainte à couper sa saison en septembre, la voilà de retour sur un circuit du LPGA Tour qui semble ne pas lui avoir manqué. Pas de réjouissance particulière, pas d’emballement non plus pour ce bon début d’année composé de 9 tournois, desquels elle n’a manqué que deux cuts pour quatre top 20 dont un top 10 ; son meilleur démarrage depuis son passage professionnel en 2013. « Je suis surtout contente de ce que j’ai mis en place avec mon nouvel encadrement », avance-t-elle.
Ce nouveau staff 100 % français que forment son coach, sa préparatrice mentale, sa psychologue et son préparateur physique s’accompagne d’une nouvelle vision de carrière. « C’est davantage un développement personnel avec le golf autour, que l’inverse. Je me construis comme ça un petit peu tous les jours. » C’est ainsi qu’elle a entamé sa nouvelle saison sans attente, sans autre objectif de résultat que de voir où son fonctionnement l’amènera en fin d’année. Dernièrement, le processus a encore prouvé sa réussite avec une qualification à l’U.S. Women’s Open qu’elle disputera du 6 au 9 juillet prochain sur l’illustre dessin de Pebble Beach - une première dans l’histoire du Majeur national. À défaut d’une grande joie pour l’obtention de sa place, la joueuse de 29 ans s’enthousiasme davantage pour le tracé lui-même. « Pour l’instant, je le connais comme tout le monde, c’est-à-dire sur la PlayStation, glisse-t-elle. Mais même là, ça fait longtemps que je ne l’ai pas joué. J’ai eu une période où je me faisais pas mal de partie sur la console mais maintenant plus du tout, il faut savoir penser à autre chose que le golf. »
Le nouveau staff de Perrine
Depuis l'hiver 2022, Perrine Delacour s'est entourée d'un staff 100 % français composé de Grégory Buisson (coach technique), Amélie Cazé (préparatrice mentale), Élise Anckaert (psychologue) et Dylan Stryczek (préparateur physique).
Le réalisme du recul
Pour cette première semaine hors golf de son année - elle a joué tous les tournois dans lesquels elle rentrait jusque ici - Perrine Delacour coupe avec la vie déséquilibrée qu’impose une carrière de joueuse professionnelle aux États-Unis. Un genre de pause qu’elle n’appliquait jamais, avant de prendre du recul et de réaliser bon nombre de choses. L’une d’elles fait partie des causes qu’elle défend. « Cette année, avec le calendrier, les gens peuvent vraiment réaliser que l’on traverse les États-Unis dans tous les sens. Et c’est triste de voir qu’on l’on se déplace ainsi quand, dans le même temps, la ville de New York est recouverte par une nuage de fumée qui vient des incendies au Canada. »
« Le LPGA Tour ne fait pas grand-chose pour aller dans le sens de la planète. Il n’y a qu’à regarder les trois allers-retours effectués à New York pour trois tournois organisés à proximité en l’espace de quatre semaines. Évidemment, je comprends les contraintes liées aux sponsors des tournois, mais c’est dommage d’en arriver là. Donc j’essaie de faire des efforts à mon échelle. » Avec plus de 135 000 kilomètres de vol effectués entre les 34 dates du calendrier réparties entre l’Asie, l’Europe et les États-Unis, l’inquiétude de la joueuse va au-delà du problème environnemental.
« Pour nous, les joueuses, c’est également très mauvais d’encaisser autant de décalage horaire. J’ai lu dans un article que le circuit était conscient de notre condition, mais je ne pense pas que les dirigeants agissent en conséquence pour autant. » Et lorsqu’on lui demande si un mouvement des joueuses pourrait un jour prendre forme, elle tranche : « Personnellement, je ne vais pas aller perdre de l’énergie pour me battre. J’ai assez perdu d’énergie comme ça auparavant, désormais je m’écoute et si je ne peux plus, je stoppe, c’est très clair pour moi. » Relancée dans son sport qu'elle articule désormais autour de sa vie personnelle, Perrine Delacour continue son chemin de l’autre côté de l’Atlantique avec une ligne directrice : « prendre du plaisir sur le parcours. » Une tâche qui reviendra avec le temps, avec ou sans résultat, tant que le cœur est mis à l’ouvrage.