Auteur lors des deux dernières semaines d’une remarquable prestation aux Q-Series avec sept cartes sur huit dans les 60 et une deuxième place finale, Pauline Roussin-Bouchard, 21 ans seulement, nous dévoile les premiers contours de sa prochaine étape aux États-Unis, sur le plus relevé des circuits féminins de golf.
Si vous deviez vous donner une note à l’issue de ces Q-Series dans l’Alabama, celle-ci serait de combien ?
Excellente question… (elle réfléchit). Je vais dire 7,5 sur 8… (rires)
On a l’impression que vous n’avez jamais douté durant ces deux semaines marathon. On se trompe ?
Pas du tout. Cela faisait des mois que je travaillais pour arriver à un tel résultat, si ce n’est des années. En plus, j’avais mon staff autour de moi. Avoir une équipe aussi solide et compétente, je crois que ce n’est pas possible (rires).
Avez-vous malgré tout ressenti une certaine pression aussi bien la première semaine à Mobile que lors de la seconde à Dothan ?
Evidemment, quand on est dans une compétition, il y a forcément un petit peu de pression mais je dirais plutôt que cela s’apparentait plus à de l’excitation. Plutôt que de la peur ou le stress de ne pas réussir. Pour disputer un tel tournoi, il faut vraiment avoir confiance en ses capacités. Je me suis fait confiance pour performer. Après, il fallait juste trouver le bon équilibre. Car huit tours sur deux semaines, c’est très long. On gère les choses différemment que sur quatre jours. Voilà ! J’étais juste concentrée sur la performance du jour sans penser de l’influence que ça pouvait avoir sur le long terme. Chaque chose en son temps, chaque tour en son temps…
Sept tours sur huit dans les 60, c’est assez remarquable tout de même…
Merci (rires). A part la carte de -2 le premier jour, j’ai oscillé entre -3 et -7 (Ndlr, avant de finir le 8e tour dans le par). J’aurais évidemment signé tout de suite pour une telle cadence au départ de ces Q-Series.
Quelle est votre force principale ?
Je dirais le mental. Cela prend une grosse partie… En fait, tout a été préparé en amont pour que tout soit en place le moment venu. Alain (Alberti, son coach) était avec moi durant cette quinzaine aux Etats-Unis. Le swing était vraiment calé. Mieux, tous les aspects du jeu étaient calés. J’avais vu Brad (Faxon) pour le putting juste avant. Calé également pour le chipping… On avait aussi très bien bossé avec Amélie (Cazé, sa prépa mental) pour être prêt ces deux semaines. J’avais aussi avec moi François (Teissedre-Dalou, son physio). Cela a été un avantage énorme car quinze jours, c’est très long et le fait de pouvoir parfaitement récupérer pour être opérationnelle le lendemain, c’est primordial.
Justement, en parlant de votre entraîneur, effectuera-t-il en 2022 plus régulièrement des voyages vers les Etats-Unis pour être à vos côtés ?
On va voir, on va s’organiser. Je pense qu’au total, ce sera entre sept et huit tournois à l’année. Mais de toute façon, je serai complètement libre pour faire des allers-retours entre les Etats-Unis et la France. Si j’ai besoin. Les décalages horaires ne me font pas peur. Si je ne le fais pas maintenant, je ne le ferai jamais. Il faut aimer voyager quand on fait ce métier. Mes deux pieds seront aux Etats-Unis mais si le besoin s’en fait sentir, rien ne m’empêchera de faire des allers-retours pour voir Alain. Cela fait trois ans que l’on fonctionne comme ça. Il ne devrait pas y avoir de souci. Mes parents viendront me voir aussi. J’aurais peut-être à effectuer moins d’allers-retours avec la France. Si ce n’est pas le cas, c’est moi qui reviendrai pour voir mes parents, mon frère, ma grand-mère…
Il parait que vous devez retourner aux Etats-Unis avant le 30 décembre. Vous nous le confirmez ?
Pour l’instant, on va imaginer le pire pour que le meilleur se passe (rires). Oui, si je n’arrive pas avoir mon rendez-vous d’urgence en France pour retourner aux Etats-Unis, je vais devoir repartir là-bas le 30 décembre. C’est une histoire de visa. Pour obtenir un nouveau visa, il me faut la signature dans le passeport, et ce visa est valable à partir du 1er janvier 2022. Pour qu’il soit valable, il me faut absolument cette signature. Jusqu’au 1er janvier, je suis encore sur un visa étudiant.
Avez-vous déjà arrêté l’endroit où vous allez vivre aux Etats-Unis pour cette saison 2022 sur le LPGA Tour ?
Oui et non. J’ai ma petite idée mais j’ai encore des détails à régler. Avoir eu François (Teissedre-Dalou) auprès de moi durant les deux semaines a, quelque part, donné un second sens à ces Cartes US, au-delà de l’objectif qui était d’évoluer sur le LPGA. Qu’il soit là lui a également permis de voir comment je m’entraîne physiquement, comment je récupère dans les tournois. Tout cela va influencer la façon dont je vais m’organiser par rapport au sport. Cela va aussi peut-être influencer l’endroit où je vais m’installer aux Etats-Unis. Donc, pour l’instant, je ne sais pas. Je sais que je ne change personne dans mon staff, ça c’est sûr. Pour le reste, je vais devoir faire mon petit business plan (rires). Ce sera soit la Caroline du Sud, à Columbia, ou la Floride, vers West Palm Beach.
En parlant de Columbia, où en êtes avec votre cursus universitaire ?
J’ai encore beaucoup de travail. Je continue pour l’instant mes études (en psychologie) pour ne pas changer drastiquement mes habitudes. Si je veux avoir mon diplôme, je pense devoir continuer encore trois ans. A voir. Tout se fera en cours par correspondance…
Chez nos confrères du Journal du Golf, vous avez aussi évoqué le fait de vouloir suivre des cours de trading ou de langue des signes…
Oui, si un jour je ne devais plus suivre mes études, j’aurais toujours des choses à découvrir ou à faire. Ainsi, je ne me vois pas faire que du golf, ou en tout cas ne vivre que pour le golf. J’imagine toujours plus. D’où cette éventualité d’apprendre la langue des signes aux Etats-Unis… Cela me plairait énormément. Apprendre une langue aussi, reprendre l’allemand… Etudier l’anatomie... C’est d’ailleurs quelque chose que je vais faire avant d’arrêter mes études car c’est primordial pour la performance et savoir se muscler. En fait, il y a plein de choses et je pense que je n’aurais pas assez de temps dans toute la vie pour faire tout ce que je veux (rires).
Les sports de combats, la boxe, vous allez continuer aussi ?
Oui… J’ai commencé les Arts martiaux en même temps que le golf, depuis que j’ai l’âge de 3-4 ans… Cela fait partie de moi. J’en ai besoin pour performer. Je garde donc !
Quand votre saison 2022 sur le LPGA Tour va-t-elle démarrer ?
Un séminaire pour les rookies du LPGA est programmé les 22 et 23 janvier prochains. Et je débuterai la semaine suivante à Boca Raton, en Floride (Gainbridge LPGA at Boca Rio). Alain (Alberti) sera d’ailleurs avec moi pour cette première.
Combien de tournois allez-vous pouvoir jouer en 2022 ?
Pour l’instant, je ne suis pas sûre de rentrer dans les Majeurs. Si je joue bien, avec le re-ranking, j’aurais peut-être plus de chances de les jouer. Mais pour le reste, je joue la plupart des tournois au calendrier 2022, oui.
Quels sont vos objectifs à court terme sur le LPGA ? Gagner rapidement par exemple ?
Je le garde pour moi ça (rires). Mais oui, je l’avais dit en août dernier lorsque je suis passée professionnelle, le LPGA est une expérience. Mais ce qui est sûr, c’est que je ne viendrai pas en touriste sur le premier tournoi du LPGA 2022 (rires). Non, ce n’est pas dans mes habitudes. Dès le départ, si je peux taper fort, je tape fort ! Tout en apprenant en même temps.
Vous êtes passée pro en août dernier, vous avez gagné dans la foulée sur le Ladies European Tour (LET), vous venez de valider votre droit de jeu complet sur le LPGA il y a quelques jours seulement, le tout en moins de six mois. C’est assez impressionnant, non ?
Je dirais que je ne réalise peut-être pas encore. Après, c’est quelque chose pour laquelle je m’étais projetée, préparée… C’est super satisfaisant car j’ai beaucoup travaillé pour y arriver. De passer professionnelle, ça n’a rien changé pour moi car j’évoluais déjà dans un système très pro. Mais c’est vrai qu’il faut maintenant laisser retomber toute cette pression de l’année écoulée afin que je puisse m’en rendre vraiment compte. Pour l’instant, c’est encore chaud.
Et le fait d’être bientôt attendue quasiment chaque semaine par les médias et les milliers de français qui suivent vos performances…
Je ne joue pas au golf pour les médias (rires). Cela a toujours était là, ça a toujours fait partie du job… Cela ne change pas mes habitudes. J’étais déjà attendue quand j’étais amateure, j’étais aussi attendue sur le LET, attendue aux Cartes US… Pour moi, ça ne m’ajoute pas plus de pression que ça.