Les trophées des Majeurs. Dans le troisième article de cette série consacrée aux grandes et petites histoires des récompenses offertes aux vainqueurs des Majeurs, vous apprendrez (peut-être) que le trophée de l'U.S. Open n'a pas de nom. Oui, oui !
Le trophée de l'U.S. Open, qui sera remis dimanche en fin d'après-midi au vainqueur de la 124e édition du tournoi, est l'un des plus prisés du golf mondial. Il récompense la victoire dans le deuxième plus ancien open national de la planète, l'épreuve ne cédant en ancienneté qu'à l'open britannique, joué pour la première fois en 1860. L'open américain vit le jour en 1895, le 4 octobre précisément, et fut doté dès le début d'une coupe tout simplement désignée comme le United States Golf Association Open Championship Trophy, ou pour faire court l'U.S. Open Trophy. Près de 130 années plus tard, c'est cette même récompense qui fait l'objet de la convoitise des meilleurs golfeurs de la planète... à quelques nuances près.
La déesse de la victoire
L'origine du trophée remonte au 22 décembre 1894, date de la création formelle de la United States Golf Association (USGA), la fédération américaine. Celle-ci vit le jour pour répondre à la nécessité d'organiser le jeu dans le pays, et c'est sous son égide que fut mis en place le premier championnat amateur, le 3 octobre de l'année suivante, et le premier championnat ouvert, le jour suivant. Pour le premier, un trophée - qui prit le nom de Theodore A. Havemayer, le premier président de l'USGA - fut commandé à la firme J.E. Caldwell and Co. ; pour le second, c'est à la Gorham Manufacturing Company que l'on s'adressa.
Celle-ci produisit une coupe en argent sterling de 45 centimètres de haut, pesant environ 4 kilos, sur laquelle est gravée une scène représentant quatre joueurs de golf (dont une femme) et, au-dessus, la mention « United States Golf Association Open Championship ». Au pied, des motifs floraux symbolisent l'éclosion et la floraison des champions, qui atteignent leur potentiel en remportant le tournoi. Sur le couvercle, une déesse ailée, allégorie de la victoire, brandit une couronne de lauriers en signe de triomphe. Pendant plusieurs décennies, les noms des vainqueurs furent gravés sur la face arrière de la coupe, jusqu'à ce que, faute de place, l'USGA ne fasse ajouter un socle - sur lequel il reste de la place pour quelques années encore !
Destruction par le feu
Durant de longues décennies, ce trophée fut remis au vainqueur qui, selon la coutume, le confiait pour un an à son club afin qu'il y fut exposé. Jusqu'en 1946, rien de bien notable se produisit : il survécut à la menace de Fred Herd, le vainqueur de l'édition 1898, à qui on demanda un dépôt de garantie de crainte qu'il ne le revende pour assouvir son penchant pour la bouteille (!) ; et à deux voyages outre-Atlantique suite aux victoires de Harry Vardon en 1900 et de Ted Ray en 1920.
Mais le 21 septembre 1946, son histoire prit fin de manière abrupte lorsqu'un incendie se déclara dans le club-house du Tam o' Shanter Golf Club à Chicago, où il trônait depuis le succès de Lloyd Mangrum, le 16 juin précédent. Dans sa 51e année d'existence, le trophée fut endommagé au-delà de toute réparation possible ; aussi l'USGA fit-elle forger une réplique exacte, qui fut prête à temps pour l'édition suivante.
Une retraite au musée
Le deuxième trophée servit jusqu'en 1986, date à laquelle il fut retiré de manière permanente et exposé au musée de l'USGA, à côte du siège de la fédération dans le New Jersey. C'est donc une autre réplique qui est aujourd'hui utilisée lors de la cérémonie de remise des prix ! Toujours confiée au champion pour une durée d'un an, elle est gravée à la demande de ce dernier, qui peut choisir d'y faire figurer son nom complet (prénom, middle name et nom de famille) ou une variante (juste le prénom, prénom et initiale du middle name, voire surnom).
La dernière péripétie notable dans l'histoire du trophée remonte à 2011 : en fin de saison, quelques mois après son succès au Congressionnal Country Club, Rory McIlroy entama une tournée de six semaines par un voyage en Chine pour jouer le Shanghai Masters, avec l'intention de faire voyager le trophée avec lui. Las, l'objet ne put être réceptionné au club par quelqu'un d'habilité, et fut renvoyé aux douanes chinoises... qui refusèrent de le restituer ! Il fallut l'intervention de l'USGA pour que, après d'âpres négociations, il rentre enfin en possession de son détenteur.
L'autre trophée de l'U.S. Open
Depuis la création du tournoi, une médaille d'or est offerte au vainqueur. Celle-ci prit divers aspects au fil des décennies, et fut officiellement nommée Jack Nicklaus Medal en 2012, afin d'honorer l'Ours blond qui, avec quatre titres dans l'épreuve, est le codétenteur du plus grand nombre de victoires.
© Chris Mummert / USGA