Deuxième Français à avoir disputé la Ryder Cup - et premier à l'avoir remporté - Thomas Levet livre ses souvenirs de sa participation à l'édition victorieuse de 2004, et décrypte l'esprit très particulier de cette compétition unique dans le monde du golf professionnel.
Cinq ans après la participation de Jean Van de Velde à l'édition 1999, Thomas Levet est devenu le deuxième golfeur français de l'histoire à disputer la Ryder Cup. C'était en 2004, du 17 au 19 septembre, sur le parcours Sud de l'Oakland Hills Country Club, près de Detroit dans le Michigan. Dans cette chronique, le sextuple vainqueur sur le Tour européen revient sur les semaines, les mois et même les années qui ont précédé cette qualification, et les émotions ressenties en validant sa place dans l'équipe.
Un moment unique dans une carrière
« Jouer la Ryder Cup, c'est un peu la consécration d'une carrière. Tu t'es battu depuis toujours pour faire des progrès, aller de plus en plus haut et participer à des tournois de plus en plus gros, et la Ryder Cup est au sommet de tout cela. Elle récompense les douze meilleurs joueurs de chaque continent, et ceux qui la jouent ont le privilège de vivre un moment très spécial. C'est un moment unique dans une carrière, car c'est un tournoi extraordinaire. On peut comparer ça, avec des émotions de plus en plus fortes, à la première fois que tu joues pour ton club, et à la première fois que tu joues pour ton pays. Ça va crescendo. Et puis c'est aussi la reconnaissance de ton niveau de jeu du moment, et ce qui est fantastique c'est que tu joues une compétition par équipes alors que tu es à ton meilleur niveau, contre des gars qui sont eux aussi en pleine bourre. Tous les joueurs qui sont là sont en forme, et c'est pour ça que le spectacle est incroyable. »
« En 2001, ce n'était pas passé loin... »
« En 2001, quand la compétition a changé d'année (suite aux événements du 11 septembre, l'édition prévue en 2001 a été décalée d'un an, chaque continent ayant gardé son équipe d'origine, ndlr), le dernier tournoi pour se qualifier était le BMW International Open en Allemagne. Je devais le gagner, et j'ai fini troisième. Là, le capitaine Sam Torrance m'a appelé pour me dire : « Bravo pour ton tournoi, ce ne sera pas là mais la prochaine fois. » Je savais à partir de ce moment-là que c'était possible pour moi. Et même avant cela, quand j'ai vu Jean Van de Velde se qualifier en 1999, ça m'a donné conscience que c'était faisable. Le truc, à cette époque, c'est qu'il fallait absolument bien jouer dans les Majeurs, car ils donnaient beaucoup de points que les autres tournois. »
Un pied dans l'équipe en gagnant le Scottish Open
« En 2004, j'avais déjà mis un pied dans l'équipe en gagnant l'open d'Écosse début juillet, puisque j'avais pris la tête du classement des points européens. En faisant cinquième au British Open la semaine suivante, avec seulement Lee Westwood mieux classé que moi parmi les autres Européens, c'était réglé. Il ne restait qu'un mois de compétition après cela, et mathématiquement c'était impossible que les joueurs derrière moi me passent devant. Je me souviens que juste après le British, Bernhard Langer, le capitaine, était venu me voir pour me demander mon programme d'ici la Ryder Cup, savoir quand on allait se voir pour pouvoir réunir toute l'équipe en amont. C'est d'ailleurs ce qu'on a fait à Akron, au Bridgestone Invitational qu'on jouait juste après l'USPGA Championship , un mois avant la Ryder Cup. On a fait une première réunion d'équipe avec tout le monde. C'est là que ça a commencé à se matérialiser dans mon esprit. »
« Le dimanche juste avant, tu ne penses plus qu'à ça ! »
« J'étais hyper content de faire partie de l'équipe, bien sûr, car c'était un rêve. Un joueur de Ryder Cup, c'est différent d'un joueur lambda du circuit. Tu as une ligne en plus sur ton C.V. Donc dès fin juillet, j'étais tranquille, je savais que j'allais la jouer. Il restait deux mois avant l'épreuve, donc je me suis bien sûr concentré sur ma préparation pour la Ryder Cup, mais j'avais quand même d'autres choses à penser ! Il y a des tournois à jouer, des Majeurs, donc j'ai continué à faire ma saison comme d'habitude. Par contre, le dimanche soir du dernier tournoi juste avant la Ryder Cup, tu sais que ça commence et tu ne penses plus qu'à ça ! C'était sympa de tous se retrouver à l'aéroport de Heathrow, tout le monde en tenue officielle. Les gens nous reconnaissaient, nous applaudissaient... C'était un peu comme quand une équipe de France, dans un sport collectif, part pour une coupe du monde. Il y avait de la sécurité, de la police, du monde : c'était très spécial. »