Avec le premier tour du WM Phoenix Open et son fameux trou n° 16 empaqueté de tribunes ce jeudi, coup de projecteur sur cinq lieux et moments où le golf, comme d’autres sports, se pratique dans une arène. Ambiance de feu comprise.

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Le trou n° 16 du TPC Scottsdale est devenu célèbre pour être celui où règne l'ambiance la plus irréelle dans le monde du golf. © Christian Petersen / Getty Images North America - AFP

Le 16 du TPC Scottsdale

Il est au centre de toutes les attentions cette semaine, alors autant commencer par lui. Le trou n° 16 du TPC Scottsdale, en Arizona, est un par 3 de 140 m environ, dont le green est défendu par quelques pentes et bunkers. Rien de particulièrement effrayant ni scénographique, mais les organisateurs du WM Phoenix Open, au fil des années, en ont fait le cœur battant de ce qui est leur incontestable réussite : faire de leur tournoi le plus gros succès populaire du PGA Tour. Au point que du haut de ses 700 000 spectateurs au bas mot (nom un peu réducteur en la circonstance, tant ils se font entendre), l’épreuve a gagné le surnom de "People’s Open". Autrement dit l’open du peuple, ou l’open des gens, comme vous voudrez.

Le 16 servait déjà historiquement de point chaud du parcours, à l’époque où les collines naturelles étaient presque les seules tribunes. Le trou-en-un réalisé par Tiger Woods, en 1997, l’a très bien prouvé.

Depuis, ce par 3 s’est fait peu à peu encercler par les tribunes artificielles, devenant un colisée à l’écart du reste du parcours. Dans cette cage sonore résonne un son quasi inédit dans l’univers du golf : des huées, lorsqu’un joueur met une évidente mauvaise volonté à attraper le green. En revanche, si un trou-en-un survient, gare aux averses de bière.

La bière, justement, dans cette ambiance spring break, coule également abondamment en interne. Au point que l’an passé, les organisateurs du tournoi ont dû faire face à un piètre spectacle : bagarres entre spectateurs, chute de plusieurs mètres depuis les tribunes du 16 (sans blessure), embrouilles verbales entre spectateurs et joueurs. Et au final, des chiffres peu flatteurs : 653 appels aux forces de l’ordre, 211 spectateurs exclus du parcours et 54 arrestations, selon les chiffres de la police de Scottsdale. Tous des nombres ayant plus que doublé depuis 2023. Pas étonnant de voir le tournoi, à l’aube de l’édition 2025, rappeler tout le monde au respect... en continuant à s'amuser, tout de même.

Le 17 de Sawgrass

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Des spectateurs, de l'eau... et quelque part, un green. © David Cannon / Getty Images North America - AFP

Tout est dans le nom : Stadium Course. Le premier du genre, à vrai dire, si l’on considère que l’idée du patron du PGA Tour d’alors Dean R. Beman, novatrice à l’époque, était de construire un parcours dont l’architecture elle-même serait orientée vers l’expérience du spectateur. Tâche confiée au célèbre architecte Pete Dye, pour un parcours ouvert en 1980, et devenu depuis l’hôte permanent du Players Championship, le plus prestigieux des tournois réguliers du PGA Tour.

Mais si le TPC Sawgrass porte en lui-même le fait d’être un stade de golf, et ce sans avoir à y rajouter des rangées entières de tribunes, un trou se démarque : le 17.

Là encore, comme à Phoenix, il s’agit d’un par 3 pas très long, avec 125 m environ suivant la position de drapeau. Différence notable cependant : personne ne vous huera si vous ratez le green. Et pour cause : comme votre balle est probablement en route pour le fond de la pièce d’eau qui entoure cette presqu’île, on vous estimera suffisamment puni comme cela.

Le 17 de Sawgrass peut être un enfer pour qui se retrouve en difficulté en son cœur. Mais un paradis pour les spectateurs qui en couvrent presque tout le pourtour. Dans la douceur floridienne de mars, vous pouvez rester toute une journée à voir passer les meilleurs joueurs du monde, et à voir se confirmer sous vos yeux le fait qu’à eux aussi, les parcours de golf font parfois des misères.

Le 18 à The Open

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Le leaderboard jaune sur le sommet de la tribune du 18 : les années passent, la technologie avance, des traditions demeurent. © Kevin C. Cox / Getty Images - AFP

Cette arène-ci, contrairement aux deux premières, est itinérante. Chaque année, elle se pose sur un parcours différent. Mais même si le décor évolue à chaque édition de The Open, l’image de cette grande tribune entourant l’arrivée des joueurs au 18, avec à son sommet le leaderboard entièrement jaune, fait partie de la carte postale du plus vieux des Majeurs. Avec différentes formules selon les parcours : uniquement derrière le green à St Andrews (il faut dire qu’à gauche, c’est le 1, et à droite, c’est la rue), de part et d’autre des derniers mètres du fairway et du green façon virages de supporters à Troon, ou encore en fer à cheval autour du dernier green comme au Royal Liverpool ou au Royal Portrush, ce dernier étant la destination pour 2025.

Quel que soit le tracé hôte, l’accueil sera assez similaire dans tous les cas : de longues séquences d’applaudissements, alors que les joueurs s’avancent vers le green pour en terminer. Une configuration qui permet d’avoir énormément de monde autour des dernières parties des deux derniers tours, bien sûr, mais qui donne aussi au public l’opportunité de regarder le tournoi de cette manière si britannique : passer la journée entière à voir défiler les joueurs, et espérer voir un joli putt ou une jolie sortie de bunker.

Le final du National

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L'Allemande Esther Henseleit à l'attaque du green du 18 de l'Albatros, lors des derniers Jeux olympiques. © Kevin C. Cox / Getty Images Europe - AFP

Soyons un peu chauvins : en France aussi, on sait créer une ambiance de stade autour du golf. Chauvins oui, mais les fans de golf de par le monde n’ont-ils pas pu constater, lors de la Ryder Cup 2018 et des Jeux olympiques de Paris 2024, à quel point les derniers trous de l’Albatros se prêtaient merveilleusement à faire basculer la foule dans la ferveur ?

Toutes les buttes qui entourent les 18 trous du parcours phare du Golf National ont pour raison d’être de favoriser la vision des spectateurs. Mais le phénomène est particulièrement vrai sur les trous 15, 16, 17 et 18, au point que nombre de suiveurs nomment désormais par réflexe ce final "stadium". Mais ici, point besoin de travées de béton, de sièges en plastique et de numéros de place. Tout se fait au naturel, sur l’herbe des pentes, au soleil… quand tout va bien.

Le départ du 1 en Ryder Cup

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Ils se sont auto-proclamés les "Gardiens de la Ryder Cup". Et ils ont des jeux de mots dans les poches de leurs vestons. © Richard Heathcote / Getty Images Europe - AFP

C’est sans doute le moment où l’ambiance sur un terrain de golf se rapproche le plus de ce qu’elle peut être dans un stade de foot. Et là encore, autorisons-nous un peu de chauvinisme : c’est particulièrement vrai sur la rive européenne de l’Atlantique. Pas forcément marqué par une ambiance très différente du reste du parcours dans les éditions de la Ryder Cup disputées au XXe siècle, le départ du 1 est monté peu à peu en température au fur et à mesure des années, et au même rythme que les tribunes qui le bordent se sont élevées. Désormais, tout y passe : banderoles, drapeaux, costumes, maquillage, chants à la gloire des joueurs… et pas de 7 h 30 du matin qui tienne.

À l’occasion de la première Ryder Cup disputée dans leur pays, en 2023, les Italiens ont même apporté encore un peu plus de culture "tifosi", le deuxième jour, en déployant une immense banderole portant le visage de Seve Ballesteros et ces simples mots, dans la langue de Dante : « Pour toujours dans nos cœurs ». Alors, calme et ennuyeux, le golf ?