Chaque jour, la rédaction de la ffgolf vous présente le coup de cœur de l'un de ses membres. Aujourd'hui, la découverte de la merveilleuse épreuve du championnat de France des jeunes, par Alexandre Mazas.
« Interrompre mes vacances d'été pour aller voir des mômes pousser la balle ? Très peu pour moi, merci ! » Voilà, en substance et à peine exagérée, ma première réaction lorsque est évoquée, au cours d'une conférence de rédaction printanière, ma présence au prochain CFJ. Le championnat de France des jeunes a beau être l'une des épreuves phares du calendrier fédéral, fière d'une histoire et d'un palmarès glorieux, elle a à mes yeux de béotien rétif le défaut de se dérouler fin juillet, à une période où je m'imagine mieux profiter de la fraîcheur d'une piscine plutôt qu'observer des gamins s'amuser avec des clubs sous le cagnard. « Tu vas voir, c'est la meilleure semaine de boulot de l'année », m'assurent quelques collègues chevronnés pour tenter de me convaincre. « On bosse dans de super conditions, on ne finit pas trop tard et les enfants sont adorables ! » Mouais...
Les parents à l'affiche
Nécessité faisant loi, me voilà pourtant poussant les portes du domaine du Gouverneur en ce jeudi 21 juillet, quelque peu réconforté par la perspective d'y retrouver certaines têtes bien connues et éminemment sympathiques, mais toujours dubitatif quant à l'intérêt du spectacle prévu sur les parcours du Breuil et du Montaplan. Mon état d'esprit s'infléchit toutefois dès les premières minutes passées à m'imprégner de l'atmosphère des lieux, joyeux mélange de cris et de rires juvéniles entrecoupés par les effusions des accompagnants qui se retrouvent. Placée devant le bureau du tournoi où s'effectuent les inscriptions, une étonnante affiche achève de me dérider : « Chers parents, n'oubliez pas... Ce n'est que du golf ! » Succinctement introduit aux arcanes de l'épreuve par les grands ordonnateurs de cette édition 2022, j'apprends avec étonnement que les parents – ni les coachs, d'ailleurs – n'ont plus le droit de servir de caddie à leurs chères têtes blondes. Pour laisser ces derniers apprendre à se débrouiller seuls, mais aussi pour les tenir à l'écart d'éventuels débordements émotionnels parentaux... « T'imagines même pas les histoires qu'il y a eu par le passé », me susurre-t-on sur le ton de la confidence.
La perspective de voir ces enfants s'affronter en match play, sans la moindre aide extérieure, devient tout de suite alléchante, et c'est avec une certaine impatience de mon côté que s'écoulent les journées d'entraînement et les deux premiers tours de qualification en stroke play, en attendant de voir de quel bois sont faites ces jeunes pousses. Ne connaissant personne parmi les quelque trois cents U12 et U14 en lice, j'en profite pour me familiariser avec certains noms et certains visages, repérer les couleurs de polo en fonction des clubs, et observer la façon dont ça joue. Moi qui m'imaginait ne pas être tellement moins bon que des golfeurs à peine sortis de l'enfance, je ravale mon orgueil en voyant ces longs drives qui fendent les fairways, ces élégants coups d'approche qui chatouillent le pied des drapeaux et ces putts affirmés comme happés par les trous... Le constat est évident : j'ai sous les yeux celles et ceux qui, dans quelques années, prendront le relais de nos chefs de file Céline Boutier et Victor Perez sur les circuits internationaux, tout simplement !
Passion partagée
Mais surtout, je découvre un autre golf, celui qui se joue avec des clubs parfois presque aussi grands que soi, qui se pratique sans calculs ni longueurs, et dont chaque coup, réussi ou raté, suscite une réaction spontanée qu'aucun préparateur mental n'a pour l'instant réussi à brider. Habitué à regarder évoluer les pros, un peu trop semblables les uns aux autres dans leur technique, leurs routines et leurs attitudes, je me réjouis de constater que pour ces jeunes, le golf est encore un jeu. Un jeu qui n'est jamais aussi amusant qu'à plusieurs, comme me le prouvent finalement les cinq journées de match play qui mènent des seizièmes à la finale. Une jeune fille rentre un chip ? Sa rivale lui saute dans les bras, toutes deux partageant la joie de ce bref instant de grâce. Un garçon, favori sur le papier, sort dépité du tournoi après sa défaite face à un adversaire moins bien classé mais qui a joué la partie de sa vie ? Cinq minutes plus tard, les deux en rigolent ensemble en faisant la queue pour commander un Coca...
Dans ce petit coin de Dombes baigné de chaleur et de lumière, l'écrémage se fait, match après match, jusqu'aux finales. Ceux qui restent en lice ne sont plus, pour moi, des inconnus. Ils ont tous un prénom, un club, un parent ou un coach qui les accompagne avec bienveillance, une histoire qui les a menés là et des rêves pour leur avenir de golfeur. Ils ont tous une passion qu'ils partagent, l'un avec sa gouaille et l'autre malgré sa timidité, devant la caméra : « On est là avant tout pour s'amuser ! » Maintenant que j'ai participé à la « meilleure semaine de boulot de l'année » et enfin goûté à la magie du CFJ, je reviendrai, c'est promis, pour travailler en m'amusant... ou m'amuser en travaillant !