Joueur du Golf de Biarritz-Le Phare, Tom Cordonnier a mis son expertise professionnelle de data scientist au service de son équipe en compilant les statistiques des dix dernières éditions de la Gounouilhou.

Tom Cordonnier, « data scientist » chez AIA Sports et golfeur à Biarritz. © Alexandre Mazas / ffgolf

Stats, data, reporting : autant de termes désormais courants dans le golf moderne. Généralisé dans le monde professionnel depuis de nombreuses années, le recours à la donnée chiffrée investit aujourd'hui le milieu amateur, et plus particulièrement cette semaine à l'occasion de la 93e édition du Trophée Gounouilhou. Une avancée due au joueur de Biarritz, Tom Cordonnier, présent au Golf du Médoc Resort avec les Rouge-et-blanc. Solide joueur amateur - à +2,8, il affiche le troisième meilleur index de son équipe - ce Basque de 28 ans exerce au quotidien la profession de data scientist, au sein de la société AIA Sports basée à Bidart. « Mon métier consiste à faire parler la donnée », expose-t-il.

Employé par l'ancien international de rugby Thomas Lièvremont, qui a monté cette agence spécialisée dans les statistiques sportives il y a quatre ans, Tom Cordonnier collecte, agrège et analyse toutes sortes d'informations au bénéfice de clubs de rugby, de pelote basque ou encore de handball, afin de les aider à dégager des axes de progression. « Ces chiffres viennent confirmer des choses que l'on sait intuitivement, par l'expérience. Le but n'est pas de révolutionner la façon de penser, mais d'orienter les stratégies des équipes en fonction de ce que disent les données », développe-t-il.

« Apporter quelque chose à mon équipe »

Aligné pour la troisième fois de sa carrière en Gounouilhou, Tom Cordonnier a souhaité apporter à son équipe quelque chose de plus que ses simples performances club en mains sur le parcours. « Sachant qu'il y avait eu une édition au Golf du Médoc en 2017, j'ai voulu regarder les scores qu'il fallait faire pour passer la qualification. J'ai donc demandé les infos à la Fédération, qui m'a fourni les chiffres des dix dernières éditions, et j'ai essayé d'en sortir quelques données », poursuit ce diplômé d'école d'ingénieur, passé par math sup / math spé.

Après quelques soirées de son temps libre consacrées à compiler les informations brutes et à les coder en langage Python, il en a ressorti deux feuilles de stats brutes, sur lesquelles il s'est appuyé pour faire passer un certain nombre de messages à ses coéquipiers. « On est, avec Cannes-Mougins, l'un des deux seuls clubs à avoir joué les dix dernières éditions. C'est bien ; mais si on a joué huit fois les quarts de finale, on n'a remporté qu'une seule Gounouilhou... Ce n'est pas assez à mon goût ! », entame-t-il en rigolant. « En allant plus loin dans le détail, je me suis aperçu qu'on n'avait que 28 % de victoires en foursome. Pire encore : on n'a jamais mené 2-0 après une session de double. Ça montre bien qu'on a une faiblesse dans ce format. » En vue de cette édition 2024, l'entraînement des Biarrots a donc été axé sur les foursomes afin de former des paires vraiment complémentaires. « C'est avec cette donnée qu'on a pu dégager cet axe d'amélioration », résume Tom.

Bienvenue dans la matrice. © Alexandre Mazas / ffgolf

Ne jamais négliger la « gomme » !

Mais au-delà du cas particulier de Biarritz, une foule d'informations plus globales ressortent de son travail. « Toutes équipes confondues, on a 79 % de chances de gagner une rencontre en menant 2-0 après les foursomes ; ça signifie donc qu'une fois sur cinq on peut réussir à inverser la situation », indique-t-il . « Autre donnée intéressante : sur les dix dernières Gounouilhou, il y a eu 21 départages "à la gomme" (à savoir, lors de la phase de qualification en stroke play, par la sixième carte de l'équipe, prise en compte uniquement en cas d'égalité sur les cinq premières, ndlr). Ça montre que même si on est à la rue dans sa partie, il ne faut jamais rien lâcher, car un seul coup peut s'avérer crucial. » Et Tom d'insister, auprès de ses coéquipiers, sur l'importance de se battre jusqu'au bout pour ramener le meilleur score possible, quelque soit la situation collective.

19 %

LA PROPORTION DE SESSIONS DE FOURSOMES GAGNÉES 2-0, MENANT DANS 79 % DES CAS À LA VICTOIRE DANS LA SESSION COMPLÈTE.

Le plus mal chaussé...

Aussi paradoxal que cela puisse paraître - et confirmant en cela le vieil adage associé à son patronyme - Tom Cordonnier ne met pas ses progrès personnels sur le compte de son expertise professionnelle. Pour passer de 3 d'index à l'âge de 18 ans - un niveau honorable mais insuffisant pour prétendre évoluer en équipe 1 - à +2 ou +3 il y a quatre ou cinq ans de cela, le data scientist a utilisé une toute autre méthode : « Je me fais souvent gronder par mes coéquipiers car je ne compte rien, pas même mes greens en régulation ou mes putts ! » s'esclaffe-t-il.

« Mais c'est peut-être ça qui m'a permis de progresser : je ne me pose pas trop de questions sur le parcours, j'essaie juste de prendre un maximum de plaisir quand je joue. Je n'ai pas fait beaucoup de compétition étant jeune, et j'ai tout découvert finalement en sortant de mes études il y a quatre ou cinq ans, donc aujourd'hui, je suis juste dans le plaisir de jouer. » Le sentiment de plénitude que procure le fait de taper dans une balle à l'aide d'un club, voilà en effet quelque chose qu'aucune statistique ne pourra jamais évaluer à sa juste valeur !

74,36

LA MOYENNE DE SCORES SUR LES DEUX TOURS DE QUALIFICATION EN STROKE PLAY LORS DE L'ÉDITION 2017, DISPUTÉE AU GOLF DU MÉDOC. SOIT 3,36 COUPS AU-DESSUS DU PAR.