Que ce soit par ses deux victoires précédentes sur le DP World Tour, ses places d’honneur dans des tournois encore plus gros ou son sérieux dans le travail au quotidien, Victor Perez a montré sa capacité à briller sur les grandes scènes. D’où un succès, la semaine passée, qui n’a pas étonné grand monde.
Déjà une grosse victoire
Ça y est. Avec le lancement du Hero Dubai Desert Classic, ce jeudi, Victor Perez peut afficher l’étoile signifiant sa première victoire, la semaine passée, en Rolex Series. Mais déjà, il ne semble pas inutile de rappeler que la liste de ses victoires dans les tournois considérés comme les plus gros rendez-vous du circuit européen remonte jusqu’en 2019. Celui qui vit depuis désormais six ans dans le berceau du golf, en Écosse, remportait alors le Dunhill Links Championship, disputé sur trois parcours autour de St Andrews, dont le légendaire Old Course.
Raphaël Jacquelin, déjà entré à l’époque dans la catégorie des routiers au long cours du Tour européen, avait pu assister à l’éclosion aux premières loges, lui qui avait alors partagé la partie de Victor Perez lors du premier tour. Et il n’avait pas été déçu, en voyant le Tarbais infliger un 64 (-8) au parcours qui avait jusque-là accueilli 28 fois l’open britannique. « J’ai beaucoup discuté avec lui pendant cette partie, témoigne Raphaël Jacquelin. Il m’expliquait sa préparation dans tous les compartiments du jeu. Il mettait déjà tout en place. J’ai vu qu’il était prêt à gagner un gros truc. »
Passé tout près à plusieurs reprises
Pour un peu, la première victoire de Victor Perez en Rolex Series, ou dans un tournoi encore plus prestigieux, serait advenue en réalité encore plus tôt. Dans les deux années qui ont suivi son succès à St Andrews, il a enchaîné les places d’honneur. Déjà, fin 2019, il prenait une quatrième place lors du HSBC Champions, épreuve du WGC, donc ayant un champ de joueurs comparable à un Majeur. La semaine suivante, il prenait une deuxième place ex æquo au Turkish Airlines Open, qui faisait alors partie des Rolex Series, en ayant participé à un play-off à six qui comprenait également Benjamin Hébert, et dont Tyrrell Hatton sortit vainqueur.
En 2020, rebelote, à Abou Dhabi en ouverture des Rolex Series : trop court de deux coups pour rattraper Lee Westwood, Victor Perez se contentait d’une 2e place ex æquo. En octobre, au BMW Championship de Wentworth, il prenait cette fois seul la place de dauphin de… tiens donc, Tyrrell Hatton. Le Tarbais roulait sur le même braquet début 2021, avec une très belle place de demi-finaliste au WGC Dell Technologies Match Play, puis une 9e place au Players Championship, officieusement considéré comme le cinquième Majeur.
Grégory Havret
« Pour ceux qui suivent le golf, ça fait un moment que Victor Perez nous a habitués à gagner et à performer dans des gros tournois, note Patrice Barquez, qui a suivi la victoire d’Abou Dhabi au micro de Canal +. Ce qui m’étonne, finalement, c’est plutôt le creux qu’il a eu entre 2021 et 2022. » Effectivement, entre ce bon résultat à Sawgrass et sa victoire insensée au Dutch Open en mai dernier, les résultats se sont faits désirer. Mais visiblement, rien de tout cela ne l’a fait dévier de son sérieux dans sa préparation.
Le sérieux dans le travail
Car de l’avis général, s’il est une raison à chercher dans le succès de Victor Perez, elle se situe en grande partie dans la qualité de son entraînement. Une qualité qui a attiré l’œil de joueurs aussi expérimentés qu’un Grégory Havret, par exemple. « Au début, quand j’ai vu Victor arriver sur le Tour, je n’étais pas spécialement impressionné, glisse le triple vainqueur sur le Tour européen. C’est plus au fur et à mesure des tournois que le sentiment est arrivé. J’ai pris la portée de Victor en le regardant du coin de l’œil. Quand tu vois un mec aussi sérieux, aussi appliqué, qui ne remet pas les choses en question, qui a la même attitude dans ses moments hauts comme dans ses moments bas, ça impressionne forcément. On a parfois l’impression d’un rouleau compresseur, d’un bulldozer qui avance. »
Faut-il, pour autant, avoir l’image d’un Perez constamment dans sa bulle, coupé des autres sur le practice ? Visiblement pas. « Quand il te croise au practice, il va dire bonjour, rigoler, dire une blague etc., mais après il retourne bosser, il ferme la porte et il fait le job, poursuit Grégory Havret. Mais les deux aspects ne s’affrontent pas du tout. Il y a un peu deux Victor. Celui qui travaille, qui est très sérieux, qui met en place des objectifs vers l’hyper-performance, et il y a le Victor du players lounge, qui me fait mourir de rire, avec ses vannes bien placées et son regard un peu coquin. En fait, il a un humour qui ressemble à son jeu : pas de chichis, et il met dans le mille. »
Une dualité confirmée par Raphaël Jacquelin : « Effectivement, il a ce côté-là, il va déconner avec tout le monde autant que les autres, je dirais. Après, ce n’est pas qu’il s’écarte, mais il rentre dans sa bulle pour se mettre dans son boulot, dans son tournoi, et il n’y a rien d’extérieur qui peut le déranger. Il va rester dans son plan, quoi qu’il arrive. Il ne changera jamais son emploi du temps pour faire plaisir aux autres. C’est très bien car le golf de haut niveau est devenu encore plus exigeant qu’avant. Il n’y a plus la place pour faire les choses à moitié. »
Les meilleures compétences réunies
Autre qualité soulevée par ceux qui l’observent de près : Victor Perez a le chic pour s’entourer des meilleurs. « Il a cette curiosité saine, relève Patrice Barquez. Il veut comprendre des meilleurs. Et du coup, il a cette faculté d’aller chercher les meilleures compétences. Il a pris auprès de lui l’ancien caddie de Rory McIlroy, JP Fitzgerald (il travaille désormais avec le Canadien James Erkenbeck, ndlr), il s’est adjoint les services de Pete Cowen, l’un des plus grands coaches mondiaux. D’ailleurs, ça se voit : lui qui est un joueur de fade naturel, on sent qu’il est désormais capable de faire plusieurs trajectoires en compétition. »
Étant installé en Écosse, il profite également de la proximité géographique avec le coach de putting Phil Kenyon, installé dans les environs de Liverpool. « Il a rentré un nombre de putts impressionnant pour sauver des pars la semaine passée, note Patrice Barquez. Et puis n’oublions pas qu’il vient d’une famille de sportifs (son père Michel Perez était joueur et entraîneur de rugby, ndlr). Il baigne là-dedans depuis qu’il est tout petit. » Pourvu qu’il continue à grandir.