Une victoire à Longwy a suffi. En se replaçant aux portes du top 5 de l’Alps Tour, Damien Perrier est plus que jamais motivé pour retrouver les échelons supérieurs du golf européen. Un semblant de résurrection selon lui, dû à bien plus que ses simples performances.

Huitième de l'ordre du mérite de l'Alps Tour, Damien Perrier vise le top 5 pour retrouver le Challenge Tour en 2025. © Aurélien Meunier / Getty Images - AFP

Damien Perrier est un ultra conscient. En prenant la route mardi matin en direction d’Arcachon où il dispute cette semaine l’open éponyme pour garder les clubs chauds le temps d’une pause calendaire de l’Alps Tour, le Rennais n’a pas simplement pris le temps de répondre aux questions qu’on lui posait. Il y a glissé un maximum de détails, enchaînant les digressions mais finissant toujours pas revenir au sujet principal. « J’essaie de fournir la matière à chaque réponse pour que ça puisse servir à l’article. J’imagine qu’après, il y a un tri et mieux vaut en avoir trop que pas assez, de toute façon », ajoute-t-il en explication. Ainsi, à l’évocation du tournoi de la semaine, a-t-il abordé la prestance des noms composant le champ de l’événement, sa dotation, mais aussi les six heures trente de route qui l’en séparent tout comme l’occasion de garder l’élan de confiance acquis après sa victoire à Longwy.

Voilà un premier grand sujet qui ressort. Victorieux deux semaines plus tôt de la toute première édition du Longwy Alps Open, le Tricolore y a signé un retour surprise pour s’imposer le dernier jour et décrocher un titre, quinze ans après son dernier sur ce circuit. Car oui, Damien Perrier est un expérimenté. Un ancien de ce que beaucoup appelaient simplement « le Tour. » « Un de ceux qu’on pourrait appeler vétérans », finit-il par plaisanter. Dans son récit du bénéfice tiré de son succès, il ouvre une parenthèse sur l’opportunité de rebondir, une autre sur la volonté de s’extirper d’un circuit qu’il n’avait plus connu depuis 2015, puis une dernière sur la densité du niveau. Mais il faut trier. Et cette victoire lui a avant tout rappelé une chose : « Lorsque tu joues pendant 17 ans chez les pros et que tu as gagné quatre tournois - deux sur l’Alps Tour, un sur le Pro Golf Tour et un sur le Challenge Tour - alors que tu disputes une trentaine de tournois par an, la victoire est rare et il ne faut pas oublier que l’on joue aussi pour ça. » Avec elle, il a redécouvert un protocole qu’il avait oublié. La reprise du micro pour s’adonner à un discours de remerciements, ou encore le besoin de ranger son coffre de manière à laisser une place pour le trophée : « Des moments uniques », résume-t-il dans un sourire.

Ce renouement avec le succès est le résultat de sa bonne performance lors du premier tour des Cartes européennes en Italie, fin août. Une 14e place qui lui a donné « l’assurance d’avancer sur les deux tableaux », comme il dit. Après une première étape validée, Longwy lui a donné l'opportunité de pouvoir cocher deux cases placées en haut de sa to do list de la saison 2024. « Il y avait l’objectif de remporter un tournoi et celui de remonter sur le Challenge Tour. »

Dans le protocole de remise du trophée, Damien Perrier n'a pas oublié comment soulever son dû. © Alps Tour

L’envie de rebondir

Voilà le deuxième grand axe de discussion. À la perte de ses droits de jeu de la deuxième division européenne fin 2023, le joueur d’aujourd’hui 35 ans a dû repasser par les cartes de l’Alps Tour après avoir évolué en première division européenne à temps plein en 2017 et 2020. Certains lui ont posé la question fatidique, celle de « faire autre chose. » Une manière soignée d’envisager une fin de carrière. Lui aussi s’est interrogé. Mais le sentiment de non-aboutissement était plus fort que la réflexion. « J’ai trois top 10 sur le DP World Tour, j’ai passé des cuts dans des tournois prestigieux, j’ai tenu tête à de très grands joueurs le temps d’un tour ou d’un week-end. Mais finalement, ce que l’on retient, c’est la faculté à y laisser ses valises sur la longévité, un peu comme un Raphaël Jacquelin par exemple. »

Alors c’est avec cette idée en tête que le Breton a avancé vers l’objectif d’intégrer le top 5 de l’ordre du mérite en fin de saison, premier moyen pour remonter en deuxième division. Et Longwy est arrivé à point nommé pour « un semblant de résurrection » avance-t-il. Propulsé à la 7e place du classement général après sa victoire, le dessein était plus que jamais atteignable. Mais le golf réserve toujours ses éléments de perturbation. « Sur les trois dernières semaines, ça a été l’ascenseur émotionnel. J’ai passé le premier tour des Q-School, j’ai surfé sur cette réussite pour m’imposer à Longwy et derrière je me suis crashé dans la tempête à Saint-Omer en manquant le cut. » S’il a, en conséquence, perdu un rang (il est désormais 8e), moins de 560 points le séparent de l’Italien Edoardo Lipparelli, locataire actuel du dernier siège convoité. Alors avec deux tournois restants au programme - dont la finale avec 10 000 points attribués au vainqueur - tout est possible. « Ce serait top de décrocher cette place dans le top 5, ça me permettrait aussi de jouer la deuxième étape des Cartes avec beaucoup plus de relâchement, vu que ça arrive après. »

Un combat collectif

Damien Perrier a donc conscience de beaucoup de choses. Il sait qu’arrivé à un trente-cinquième printemps, l’objectif d’une remontée au plus haut niveau est rendu tortueux par la densité d’une strate qui ne récompense que les cinq meilleurs de son circuit satellite. Au milieu des « jeunes de l'Alps », il ne veut pourtant pas s'éterniser. Même si selon lui, la tâche n'a jamais été aussi dure qu'à cette époque. Il accepte le fait que le peloton de n’importe quel circuit mondial, quel qu’il soit, n’a jamais été aussi fort. Et enfin, il est alerte sur ce qu’engendrerait la réussite de son objectif, comme l'échec de celui-ci. Mais il n’abandonne pas. Car il sait que beaucoup croient en lui. D’une famille de golfeurs où père, mère, frères et sœurs, oncles et tantes se sentent concernés par son évolution, à une petite amie au soutien infaillible en dehors des fairways ainsi qu'au sac une bonne moitié de l’année, jusqu’à des sponsors présents comme une deuxième famille depuis près de dix années derrière lui ; « je leur ai dédié la victoire à Longwy, mais tous n’étaient pas là pour l’entendre. Sans eux, je n'aurais pas eu autant de motivation pour remonter. »