Les "Pourquoi" du golf. Les Jeux paralympiques de Paris 2024 s’ouvrent ce mercredi 28 août, sans paragolf au programme. Mais la discipline travaille dur pour faire prochainement son entrée, peut-être à Brisbane en 2032. Explications.

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Les Jeux paralympiques de Paris 2024 s'ouvrent ce mercredi 28 août. © Alex Slitz / Getty Images Europe - AFP

D’abord, les légendes urbaines

Pour entamer l’explication concernant l’absence (pour le moment) du paragolf au programme des Jeux paralympiques (JP), il est d’abord utile de tordre le cou à quelques canards. Le principal d’entre eux est sans doute celui faisant croire qu’à partir du moment où une discipline figure parmi les épreuves des Jeux olympiques (JO), sa discipline parasportive associée fait automatiquement son entrée aux Jeux paralympiques.

Or, cette automaticité n’existe pas. Et ce pour une raison simple : les Jeux olympiques et paralympiques sont gérés par deux entités qui, si elles travaillent main dans la main, sont tout de même distinctes. Ainsi, les JO se tiennent sous le patronage du Comité international olympique (CIO), et les JP sous celui du Comité international paralympique (plus souvent désigné par son sigle anglais, IPC). Ce dernier est celui qui décide du nombre de disciplines et d’athlètes lors de chaque édition des Jeux paralympiques, et donc de quels sports entrent ou sortent du programme.

Toutefois, si le retour du golf lors des JO de 2016 n’a pas impliqué l’arrivée simultanée du paragolf aux JP, une communauté de destin va tout de même unir les deux dans les années qui viennent. Mais il en sera question plus bas.

Alors, pourquoi pas de paragolf ?

Le paragolf en tant que tel aurait tout-à-fait vocation à figurer au programme paralympique, en tant que discipline sportive pratiquée par des athlètes atteints de différents types de handicaps. « Sauf que la maison n’est pas encore complètement construite », observe métaphoriquement Aurélien Lacour, référent paragolf au sein de la Fédération française de golf. En effet, trois critères sont fondamentaux, au regard de l’IPC, pour que la petite balle blanche entre dans la galaxie paralympique.

Par ordre croissant d’importance, il y a tout d’abord, l’application du code mondial anti-dopage. Cela implique un règlement précis, ainsi que la réalisation de contrôles durant les grandes épreuves du calendrier. Sur ce plan, les choses sont en train de se mettre en place.

Ensuite, l’IPC tient à ne dialoguer qu’avec des fédérations internationales dans les différentes disciplines, et à ce qu’une hiérarchie mondiale parmi les différentes nations puisse être établie. Or, le paragolf a longtemps été géré par différentes entités comme le R&A, l’USGA de l’autre côté de l’Atlantique, ou encore l’EDGA (European Disabled Golf Association), créée en 2000 sur le Vieux continent. Par ailleurs, jusqu’à présent, aucun championnat du monde paragolf ne s’est tenu. Un classement mondial existe bien, le World Ranking for Golfers with Disability (WR4GD). Mais il est uniquement individuel.

Et puis, il y a « la question qui fâche », comme la décrit Aurélien Lacour : celle des catégories. « L’IPC ne fonctionne pas avec les mêmes catégories de handicap que celles qui étaient les nôtres jusqu’à maintenant, explique le référent fédéral. À leurs yeux, il est aberrant qu’un joueur en fauteuil joue dans la même compétition qu’une joueuse malvoyante ou qu’un joueur double amputé, par exemple. Pour eux, ce n’était pas possible. »

L’espoir à partir de Brisbane

Pour toutes ces raisons, et malgré les dossiers déposés de manière répétée auprès de l’IPC, le paragolf n’a pas encore fait son entrée aux Jeux paralympiques. Cela n’interviendra pas lors des Jeux de Los Angeles, en 2028, pour lesquels le quota de sports et d’athlètes est déjà fixé, Paris et la ville californienne ayant été désignées hôtes des Jeux au même moment. Mais pour Brisbane, en 2032, l’espoir est tout-à-fait permis. Car les choses bougent.

En effet, depuis plusieurs années, la Fédération internationale de golf (IGF) a pris à bras le corps le dossier du paragolf, justement dans l’optique de faire entrer la discipline aux Paralympiques. Certes, l’IGF n’est pas l’instance internationale du jeu de golf la plus connue, à côté de poids lourds comme le R&A et l’USGA. Mais cette structure chapeaute principalement l’organisation de deux événements : les Championnats du monde amateurs par équipes et… les épreuves olympiques de golf. Surtout, dans le cas du paragolf, elle permet à l’IPC de dialoguer directement avec une fédération internationale. Ce qui lève un premier obstacle.

Un deuxième pourrait bientôt appartenir au passé : celui de la hiérarchie mondiale. La tenue d’un Championnat du monde paragolf, si elle n’a pas encore été officiellement annoncée, est très fortement envisagée dès 2025. « Il faut vraiment, avant Brisbane, qu’il y ait plusieurs éditions, pour démontrer la faisabilité de la chose, et que le format fonctionne », insiste Aurélien Lacour.

Et puis, plus important encore : les lignes bougent également en ce qui concerne les catégories. Le résultat de 10 années de travail environ. « En gros, on passe de catégories golfiques à des catégories physiques ou fonctionnelles », note Aurélien Lacour. Désormais, neuf catégories existent au sein du paragolf (deux intellectuelles, deux en fauteuil, deux visuelles et trois debout), lesquelles sont ensuite déversées au sein de quatre blocs. Le bloc 1 représentant les athlètes les moins lésés, et le bloc 4 les plus lésés.

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Charles-Henri Quélin et Mélody Roccaz, associés en double, en juillet dernier, lors du Championnat d'Europe par équipes paragolf. © DGV

Ces nouvelles catégories ont été mises en place au Championnat d’Europe par équipes paragolf pour la première fois en juillet dernier. L’épreuve proposait ainsi un tout nouveau format, qui pourrait bien se décliner dans de prochains championnats du monde, voire à de futurs Jeux paralympiques. Chaque équipe était constituée de quatre joueurs issus chacun d’un des quatre blocs, avec mixité obligatoire (au minimum un homme et une femme dans l’équipe). Ainsi, Philippe Pée Dit Grabet, Charles-Henri Quélen, Mathieu Cauneau et Mélody Roccaz ont permis à la France de devenir la première championne d’Europe dans ce nouveau format, qui rebat les cartes. « Il fallait trouver, pour chaque fédération, non pas les meilleurs joueurs, mais le meilleur joueur dans chaque bloc, souligne Aurélien Lacour. Et ça, l’IPC dit ok. »

Mais alors, on saura quand ?

Le programme olympique et paralympique pour Brisbane en 2032, ainsi que les quotas de disciplines et d’athlètes, devraient être arrêté quelques mois avant les Jeux de Los Angeles. On saura, alors, si le paragolf fera son entrée au programme des JP en Australie. Mais il y a une dernière condition.

Souvenez-vous de cette histoire de communauté de destin entre golf aux JO et paragolf aux JP. Il se trouve que dorénavant, et hormis pour des disciplines historiques et culturellement ancrées aux Jeux paralympiques comme la boccia (un jeu de boules cousin de la pétanque), toute nouvelle discipline paralympique ne sera acceptée que si sa cousine pratiquée par les valides est toujours au programme olympique. Dit autrement, si par malheur, le golf devait sortir du programme des JO, le paragolf ne pourrait pas faire son entrée aux JP. Il importe donc au monde du golf tout entier de continuer à pousser, pour continuer de se prendre aux Jeux.